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Poursuite de 1,1 M$ contre la Ville de Montréal

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Radio -Canada

2018-10-31 12:10:00

La famille d'un homme abattu par la police réclame des dommages moraux et punitifs.
Nicholas Gibbs, un jeune père de famille de 23 ans abattu par les policiers montréalais le 21 août dernier
Nicholas Gibbs, un jeune père de famille de 23 ans abattu par les policiers montréalais le 21 août dernier
La famille de Nicholas Gibbs, un jeune père de famille de 23 ans abattu par les policiers montréalais le 21 août dernier, a déposé mardi une poursuite de plus de 1,1 million de dollars en dommages moraux et punitifs contre la Ville de Montréal.

La famille, ainsi que des proches et des membres de groupes communautaires, ont rencontré les médias mardi matin pour faire part de leurs intentions et pour présenter une courte vidéo de 2 minutes et 55 secondes.

« Si cette vidéo n'existait pas, nous ne serions probablement pas ici avec vous aujourd'hui », a déclaré le militant des droits civiques et ancien policier de la GRC Will Prosper.

Dans cette vidéo tournée par un citoyen depuis la fenêtre d'un immeuble voisin de l'événement, on aperçoit les policiers faire feu à cinq reprises en direction du jeune homme, les deux dernières balles étant tirées alors qu'il leur tourne le dos.

« Il n'y a rien au monde qui pourrait justifier les deux dernières balles tirées dans le dos, à part vouloir exécuter cette personne », a affirmé M. Prosper.

On peut également y constater que les policiers crient à plusieurs reprises et en même temps, en français, au jeune homme de ne pas bouger, mais que Nicholas Gibbs, qui ne parlait pas français, continue de marcher calmement sans obtempérer à cet ordre répété de s'immobiliser.

Selon la version policière, Nicholas Gibbs s'avançait vers eux avec un couteau, mais la vidéo ne permet pas de confirmer qu'il avait un couteau. Les images ne présentent qu'une minute de l'intervention précédant les coups de feu, qui ont tous été tirés en cinq secondes.

« La personne la plus calme dans cette vidéo, c'est plate à dire, c'est Nicholas Gibbs », a fait valoir Will Prosper.

« Le ou les policiers qui ont tiré ne se sont jamais préoccupés du résultat du premier tir avant de passer au deuxième, ne se sont jamais préoccupés du résultat du deuxième avant de passer au troisième », a fait valoir l'un des avocats de la famille, Me Alain Arsenault.

« Il est possible de blesser une personne avec une arme à feu et de ne pas [la] tuer, mais encore faut-il qu'il y ait une volonté de regarder la situation », a ajouté l'avocat.

« Il faut que ça cesse »

Participant à la conférence de presse, la mère de Nicholas Gibbs, Erma Gibbs, était inconsolable. Elle tenait dans ses bras la petite Angel Bartley Gibbs, 10 mois, dernière des trois enfants de son fils.

« Je veux que ces policiers soient accusés, parce que mon fils n'avait pas à mourir comme ça », a-t-elle affirmé, un appel repris par Jeremy Gibbs, le neveu de Nicolas Gibbs, qui le considérait plutôt comme son frère, les deux hommes ayant le même âge.

Le Directeur des poursuites criminelles et pénales ne prendra toutefois aucune décision quant à d'éventuelles poursuites criminelles contre les policiers impliqués avant d'avoir reçu et analysé le rapport du Bureau des enquêtes indépendantes (BEI), rapport qui n'est pas attendu avant plusieurs mois.

« Tous les policiers ne sont pas mauvais, mais ils doivent être formés comme il faut, ils doivent être éduqués pour savoir comment travailler avec des gens de différentes nationalités dans cette ville », a ajouté Mme Gibbs, qui a dénoncé au passage le comportement des policiers dans le quartier Notre-Dame-de-Grâce, qui « peuvent être très agressifs avec les jeunes Noirs ».

« On n'a pas à subir ça. Il faut que ça cesse », a-t-elle affirmé, alternant entre les larmes et la fermeté.

Tant la famille que ses avocats ont montré les policiers du doigt pour ne pas avoir tenté de parler au jeune homme.

« Les policiers sont formés pour intervenir dans ce genre de situation là; ils sont formés en désescalade », a fait valoir Me Virginie Dufresne-Lemire, qui représente également la famille.

« Couteau ou pas, cette intervention aurait dû se terminer autrement », a-t-elle laissé tomber.

Le SPVM critiqué par le Bureau des enquêtes indépendantes

On a aussi présenté une lettre de la directrice du Bureau des enquêtes indépendantes (BEI), Madeleine Giauque, au directeur du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), Martin Prud'homme, dans laquelle elle reproche au SPVM de ne pas avoir respecté la loi lorsque ses agents ont procédé à des interrogatoires de témoins et ont soumis leurs déclarations aux enquêteurs, le tout avant l'arrivée des enquêteurs du BEI.

Me Giauque note que cette façon de faire se répète « dans plusieurs, sinon la totalité, des enquêtes du SPVM », alors que la loi prévoit, dans de tels cas, que les policiers sécurisent la scène et s'en écartent jusqu'à l'arrivée des enquêteurs du BEI sans interroger les témoins et sans remettre les témoignages aux enquêteurs. Me Giauque ajoute que « le SPVM est le seul corps policier à agir ainsi à travers la province ».

Me Arsenault a vigoureusement dénoncé l'absence de tout changement dans les méthodes du SPVM.

Il a fait valoir que les dix derniers décès aux mains des policiers, soit depuis la mort de l'itinérant Alain Magloire en février 2014, se rapportent tous à des personnes présentant des problèmes particuliers.

Neuf de ces victimes étaient en crise, quatre étaient des personnes noires, quatre étaient des itinérants et deux avaient des problèmes de toxicomanie.

Dans le cas d'Alain Magloire, le coroner Luc Malouin avait notamment recommandé une formation plus adaptée aux policiers et l'augmentation du nombre de pistolets électriques.

« Depuis la dernière enquête du coroner sur le sujet (...) y a-t-il quelque chose de changé en matière d'intervention des policiers auprès d'une clientèle vulnérable? La réponse est non », a déploré Me Arsenault.

« Les élus ne peuvent pas ou ne veulent pas donner des directives claires aux services de police concernant les moyens moins violents pour intervenir auprès d'une clientèle en crise, en situation d'itinérance, avec des problèmes de toxicomanie et surtout s'ils sont membres d'une minorité visible », a accusé l'avocat.
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7 commentaires
  1. Anonyme
    Anonyme
    il y a 6 ans
    "Nicholas Gibbs, qui ne parlait pas français"
    On devine la récupération qui sera faite de cette partie de l'histoire par les apôtres du bilinguisme institutionnel...

  2. Urbain
    Urbain
    il y a 6 ans
    En règle
    Encore un forcené avec un couteau dont la famille justifie le comportement et met la faute sur les policiers. La vidéo est dure mais au final, ça ne montre aucune bavure. Une vidéo où il y a un mort aura toujours un impact important mais ça ne veut pas dire que l'intervention n'était pas justifiée. C'est malheureux, peut-être que ça aurait pu finir autrement, mais Gibb a voulu jouer au plus fort et ça donne parfois des drames.

    Je ne sais pas quelle vidéo Will Prosper a regardé mais Nicolas Gibb ne semble pas le plus calme du tout et n'est même aucunement calme . Aussi, quand un gars agressif a un couteau et avance vers toi, c'est normal de ne pas rester calme, ça s'appelle l'instinct de survie. Le déroulement était confus mais si les balles dans le dos auquel il fait références ont été tirées parce que Gibb se dirigeait vers un autre des policiers, ces tirs semblent justifiés.

    Aussi, c'est sa responsabilité ultimement de parler français au Québec pour comprendre les ordres des policiers. Langue ou pas, ça n'était pas très compliqué de comprendre ce que les policiers voulaient.

    Par contre, il est vrai que le SPVM ne devrait pas interroger les témoins, il y a un manque d'indépendance flagrant. Et oui, il devrait augmenter le nombre de pistolets électriques pour régler le plus possible ces situations, je me demande bien la raison pour laquelle ça n'a pas encore été fait.

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 6 ans
      Hummm...
      "Encore un forcené avec un couteau dont la famille justifie le comportement et met la faute sur les policiers."

      C'est votre interprétation du texte? Si c'est le cas, soyons honnêtes, le reste de votre commentaire ne vaut pas très cher.

  3. Anonyme pas de bonne humeur
    Anonyme pas de bonne humeur
    il y a 6 ans
    Mensonger
    Au visionnement du vidéo: Pas besoin de parler français pour comprendre que plusieurs policiers armés en uniforme crient et sont stressés, qu'ils reculent et crient à Gibbs NON, NON, NON. Le gars continue d'avancer d'un bon pas, il est absolument évident tout au long que cet individu armé d'un couteau cherche à se retrouver à portée d'un policier. Non, pas besoin de parler français. Je serais dans n'importe quel pays et je saurais que ça veut dire: Bouge pas, reste tranquille, lève les mains et je ne me promènerais pas avec un couteau en plus. Pire, on entends clairement le policier qui recule crier en anglais : Stay there man ! Mais le gars continue d'avancer, il est clair qu'il veut en découdre avec un policier. Les policiers ont tiré 5 fois avant qu'il ne cesse de marcher. Les policiers n'ont rien à se reprocher. Encore une fois, on va occuper sans raison la Cour, faire appel ensuite car on sait bien sûr qu'ils vont le faire. Prétendre tout au long dans les médias que c'est à cause du racisme. J'en ai vraiment marre et suis dégoûtée encore de ces mensonges.

  4. Avocat
    Avocat
    il y a 6 ans
    Bien dit!
    Et voilà. CQFD.

  5. CFF
    +1
    J'étais sur le point de rédiger un commentaire, mais vous avez tout couvert.

  6. Anonyme
    Anonyme
    il y a 6 ans
    Le problèmes est plus fondamental
    Le gars était effectivement menaçant, et aurait dû comprendre qu'il devait se calmer le pompom.

    Le problème fondamental de cette intervention, et qui est assez répandu, ce sont des "règles d'engagement" officielles trop permissives pour les policiers (celles-ci leur auraient même permis de tirer bien avant).

    Trois patrouilleur en forme et entrainés devraient pouvoir sans grande difficultés venir à bout d'un petit voyou (fut-il armé d'un couteau, d'un marteau, ou d'une barre de fer), même sans taser, et c'est un grief compréhensible de la part de la communauté noir, car une intervention de ce type à Hampstead, impliquant un fils de "bonne famille", n'aurait certainement pas connue la même issue.

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