La justice doit être une priorité
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Jean-Vincent Lacroix, Sylvain Leboeuf, Dominique A. Jobin
2017-01-20 10:15:00
Lors de la signature de la dernière convention collective en 2012, le gouvernement s’est engagé par écrit à le revoir. Aujourd’hui, la problématique demeure entière. Le gouvernement doit maintenant respecter son engagement et accepter de négocier en toute bonne foi.
Refus de respecter sa parole
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La justification : les avocats et notaires de l’État québécois ne peuvent aucunement être comparés à leurs confrères avocats œuvrant au sein du Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP). Une telle affirmation démontre une méconnaissance flagrante de notre rôle au sein de l’administration publique et de notre apport à l’administration de la justice au Québec.
Les avocats et notaires de l’État québécois sont les conseillers juridiques d’une cinquantaine de ministères et organismes du gouvernement. Ils conseillent les autorités gouvernementales quant à la validité juridique des actes posés par l’administration publique. Ils représentent le gouvernement devant les tribunaux (dont de nombreuses poursuites pénales). En matière de normes du travail, par exemple, ils représentent des citoyens dont les droits ont été lésés. Ils rédigent les lois et règlements adoptés par l’Assemblée nationale, dont les lois pénales québécoises appliquées par les avocats du DPCP.
À titre de représentants du Procureur général du Québec, nous défendons devant les tribunaux la validité constitutionnelle des lois québécoises et des dispositions du Code criminel appliquées par nos confrères du DPCP, avec lesquels nous travaillons d’ailleurs souvent en étroite collaboration. Nous défendons aussi, et ce, jusqu’à la Cour suprême du Canada, les compétences législatives du Québec face aux empiètements du gouvernement fédéral.
Indépendance
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À cet égard, nous demandons seulement d’être traités au même titre que nos confrères du DPCP qui bénéficient maintenant d’un nouveau mécanisme de négociation apolitique. Comme eux, nos fonctions sont apolitiques, c’est-à-dire que nous devons agir à l’abri des considérations partisanes et nul ne peut nous dicter les avis juridiques que nous devons fournir. Notre revendication n’est pas inusitée.
À l’instar de nos collègues du DPCP, nous représentons l’État et sommes tous des officiers de justice ayant pour mission d’assurer le respect de la règle de droit, et ce, dans l’intérêt public. Cet aspect primordial de notre rôle unique transcende les différents domaines du droit dans lesquels nous exerçons (que ce soit, notamment, en droit civil, en droit pénal, en droit criminel, en droit administratif, en droit constitutionnel).
Les avis juridiques que nous rendons ont un impact important sur la population (par exemple, lorsqu’il est conseillé de modifier un projet de loi en raison des difficultés qu’il présente eu égard au respect des droits et libertés des individus). Ainsi, notre indépendance est tout autant justifiée que celle d’un avocat du DPCP dont la décision ne concerne que la ou les personnes impliquées dans un événement particulier.
Traitement différent
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Le fédéral et l’ensemble des provinces canadiennes reconnaissent cet aspect à l’égard de leurs juristes respectifs en accordant le même traitement aux procureurs qui œuvrent, entre autres, en matière civile, administrative, criminelle ou constitutionnelle.
Le gouvernement doit négocier en toute bonne foi et respecter son engagement de revoir notre régime de négociation. Refuser de le faire ne fera que semer le doute quant à notre réelle indépendance. Comment alors expliquer aux gens que notre société est fondée sur l’État de droit si le gouvernement déconsidère les avocats et notaires devant le conseiller dans le respect de la règle de droit, de la Constitution ? La justice doit être une priorité.