Qu’en est-il de la compétence de l’arbitre de griefs dans un litige portant sur le régime de retraite?
Sharlie Lafrance
2024-09-09 11:15:36
Focus sur une récente décision concernant le régime de retraite…
Dans la décision Ville de Gatineau et Association des pompiers et pompières de Gatineau, 2024 QCTA 280, 21 juin 2024 (a. Me Éric Lévesque), le Tribunal d’arbitrage est saisi d’un grief de l’Association reprochant à l’employeur, la Ville de Gatineau, de ne pas avoir versé au régime de retraite sa cotisation et celle des salariés. La convention collective prévoit notamment que les salariés en congé d’invalidité en sont exonérés.
Cependant, pour l’employeur, la compétence du Tribunal se limite à s’assurer qu’il maintient en vigueur le régime de retraite. De ce fait, le grief devrait être rejeté sur cette base.
Le Tribunal doit donc statuer sur sa compétence lorsque la question repose sur le régime de retraite de salariés syndiqués. Ensuite, le Tribunal doit déterminer si l’employeur a fait défaut de verser au régime de retraite sa cotisation et celle des salariés en congé d’invalidité qui en sont exonérés pendant leur congé.
Dans ses motifs, le Tribunal rappelle certains principes dégagés dans d’autres décisions[1] en pareille matière et indique que la compétence d’un arbitre de griefs demeure intimement liée à la question de savoir si le litige est rattaché expressément ou implicitement à la convention collective. Ainsi, un Tribunal d’arbitrage n’aura compétence pour entendre un litige sur le régime de retraite que si ce régime est incorporé à la convention collective. À l’inverse, le Tribunal n’aura pas compétence lorsque la convention collective est muette ou lorsqu’elle ne fait que prévoir l’obligation pour l’employeur de payer les primes du régime et de le maintenir en vigueur.
En l’espèce, l’arbitre convient que l’employeur a comme obligation à l’égard du régime de retraite de le maintenir en vigueur et de ne pas le modifier sans l’accord de l’Association. Or, la preuve démontre que l’employeur n’a contrevenu à aucune clause de la convention collective. D’autant plus, l’arbitre insiste sur le fait que le régime de retraite n’est pas incorporé à la convention collective, de sorte que les parties n’ont pas souhaité élargir la compétence de l’arbitre sur cette question.
Le Tribunal rejette donc le grief, le déclarant sans fondement.
[1] Ville de Montréal, Canadian Labour Arbitration, 5th Edition § 4 :7 à § 4 :11 ; Brown and Beaty, 2021 CanLII 154867 (MB LA) ; Shared Health inc., 2021 CanLII 154867 (MB LA).
À propos de l’auteure
Sharlie Lafrance est avocate chez RBD. Elle consacre maintenant sa pratique à la défense des intérêts des salariés provenant des milieux policiers et ambulanciers du Québec. Elle traite des différents enjeux relatifs aux rapports collectifs du travail ainsi qu’au domaine de la santé et sécurité au travail.