Une bonne (ou mauvaise) plaisanterie peut-elle vous coûter votre job?

Gabriel Granatstein
2010-10-14 13:15:00
Je m’abstiens donc généralement de raconter des blagues à la maison ou au travail.
Sans pour autant allez dire que cette réserve fait de moi une exception, le monde du travail est truffé de personnes prêtent à vous dire: « t’as deux minutes, j’en ai une bonne. »
Que celle-ci soit d’ailleurs bonne ou pas…
La frontière qui sépare ce qui est drôle et ce qui est inapproprié est parfois difficile à délimiter, et les avocats en droit de l’emploi et du travail sont souvent appelés à gérer des situations où cette frontière aurait été franchie.
Les conséquences sont généralement beaucoup moins amusantes que ce que l’employé avait prévu au départ.
Les blagues au bureau en quatre exemples
1. Dans une première affaire (TUAC, Section Locale 501 et Sobey’s (entrepôt), D.T.E. 2006T-568), un employé de 63 ans a voulu faire rire ses collègues en sautant de son camion alors qu'il était encore en marche.
Il s’est alors mis à courir à côté du véhicule, vraisemblablement dans le but d’imiter un agent des services secrets qui protège un président ou un premier ministre. Il a été congédié à la suite de cette plaisanterie.
Aux yeux de son employeur, cette manœuvre de l’employé a mis en péril sa sécurité ainsi que celle de ses collègues de travail.
L’employé a contesté cette décision devant un arbitre de griefs.
Considérant son ancienneté, l’arbitre a accepté de modifier la terminaison de l’emploi en une suspension, en plus de limiter l’employé à travailler dans l'entrepôt de la société et à ne plus manœuvrer les camions de l’entreprise.
On peut donc dire qu’une simple blague a mis cet employé dans de beaux draps!
2.Dans une autre affaire (Syndicat démocratique du Château Frontenac (CSD) et Legacy Hotels Corporation, l'établissement Fairmont Le Château Frontenac, D.T.E. 2005T-294), l’employé d’un restaurant situé dans un établissement hôtelier a voulu jouer un tour à un de ses collègues.
L’employé a eu l’idée de substituer des œufs crus qu’un autre employé devaient utiliser pour préparer une salade césar devant les clients par des œufs durs.
L'employé a été congédié pour cause d’un comportement inapproprié.
L’arbitre a considéré que la blague avait nui à la réputation de l’établissement et a confirmé la rupture de l’emploi.
De toute évidence, l’employé n’a pas réussi à tuer dans l’œuf toute cette histoire!
3. Soulignons enfin un dernier cas (Commission de la santé et de la sécurité du travail du Québec c. Olynyk, D.T.E. 93T-174) ayant impliqué le maire de Greenfield Park au début des années 1990.
Le maire et un de ses employés avaient préparé leur coup avec minutie.
Le maire a d’abord prétendu congédier l’employé devant un groupe de personnes.
L’employé, de connivence avec le maire, a alors sorti un fusil chargé de cartouches à blanc et a fait semblant de tirer sur le maire et sur un autre collègue. La secrétaire, qui a assisté impuissante à la scène, a subi des séquelles psychologiques.
Le maire a été condamné à payer une amende 1 500 $ en vertu la Loi sur la santé et la sécurité au travail.
4.Également, entre humour et harcèlement, la ligne peut parfois être très mince.
L’affaire Pelletier et Securitas Canada ltée, D.T.E. 2004T-1149 illustre le genre de situations où un employé a franchi cette ligne.
Dans ce cas, l’employé a cru faire preuve d’humour en levant la jupe d'une de ses collègues et en posant sa main sur son entrejambe.
La collègue en question a porté plainte contre l’employé.
Ce dernier a tenté de se défendre en plaidant qu’il ne s’agissait que d’une plaisanterie, mais plusieurs autres plaintes avaient déjà été déposées contre lui, notamment suite à d’autres « blagues » à caractère sexuel.
L’arbitre a confirmé le congédiement de l’employé.
Que retenir de cet article?
Qu’il ne faut pas sauter d'un véhicule en marche, feindre de tirer sur un de ses collègues, remplacer des œufs crus par des œufs durs dans une salade ou encore que le harcèlement sexuel n'est jamais drôle?
En fin de compte, retenez surtout que faire une plaisanterie au travail, c’est un peu comme marcher sur des œufs ...
Ma femme a sans doute raison. Je ne suis pas drôle, surtout quand j’essaie de l’être.
M
il y a 14 ans«Dans ce cas, l’employé a cru faire preuve d’humour en levant la jupe d'une de ses collègues et en posant sa main sur son entrejambe»
Est-ce que je suis le seul à ne pas voir la «blague» ici?
Imaginez un peu : «Hey chérie! tu ne devineras jamais la blague que j'ai fait au travail aujourd'hui...»
Anonyme
il y a 14 ans> «Dans ce cas, l’employé a cru faire preuve d’humour en levant la jupe d'une de ses collègues et en posant sa main sur son entrejambe»
>
> Est-ce que je suis le seul à ne pas voir la «blague» ici?
>
> Imaginez un peu : «Hey chérie! tu ne devineras jamais la blague que j'ai fait au travail aujourd'hui...»
Effectivement, pas très drôle. Par contre, l'employé de Sobeys aka James Bond - celle là est très bonne!
Bien aimé l'article...
Me
il y a 14 ans>>>>> Ma femme a sans doute raison. Je ne suis pas drôle, surtout quand j’essaie de l’être.
On salue chaleureusement Chantal.