Du droit … au stand-up!
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Theodora Navarro
2016-08-03 15:00:00

Elle suit le parcours droit civil et common law de McGill et rejoint La Haye comme stagiaire auprès d’un juge italien qui siège dans le cadre du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie. Le Barreau de l’Ontario en poche, elle repart comme avocate à La Haye.
« Ça a duré deux ans et demi et puis j’ai commencé à m’intéresser au stand-up comedy, raconte l’intéressée en anglais. Ça s’est fait progressivement.» Elle se rend à quelques spectacles et y prend du plaisir. Quelque temps plus tard, elle ose le grand saut. Sans retour en arrière.
Prendre son temps
La transition lui a pris un peu de temps. Loin de se réveiller un matin avec l’envie de tout bousculer, Jess Salomon a laissé sa nouvelle carrière venir à elle, en apprenant le métier et en mettant de l’argent de côté. Lorsqu’elle a senti qu’elle commençait à maîtriser l’écriture, elle s’est lancée.
« J’ai plusieurs façons de travailler. Il y a parfois un sujet dont j’ai vraiment envie de parler, qui me fait réagir par exemple, et je réfléchis à comment l’articuler pour qu’il marche!, évoque Jess Salomon. Parfois, je me lève avec une idée, et elle est bonne comme ça. Plus tu fais de jokes, plus tu sais ce qui marche. »
Et ce qui marche le plus, selon elle, c’est le sexe, et les relations amoureuses. « Ce sont des sujets dans lequel le public se reconnaît, ça fonctionne toujours, sourit-elle. La politique, par contre, notamment si c’est un public que tu ne connais pas bien, c’est plus risqué! »
Beaucoup de soi
Dans ses spectacles, elle parle peu de son ancien travail. « Les tribunaux de guerre, c’est un sujet sur lequel il est difficile de rire, estime-t-elle. Mais surtout, je n’ai pas envie que les gens prennent conscience de ce que je faisais et se disent “elle ferait mieux d’y retourner!” »
Car la difficulté des shows d’humour, selon Jess Salomon, c’est que l’humoriste y implique beaucoup de personnel. « C’est difficile de se distancier. Quand les gens ne rient pas ou qu’ils critiquent ce que tu fais, tu te mets à penser qu’ils ne t’aiment pas toi, en tant que personne. Ce n’est pas un travail où tu peux facilement séparer le privé du professionnel comme lorsque tu es avocat.»
Reste que, quelque part, le tribunal est pour elle une véritable scène. « Il suffit de voir comment les gens parlent, agissent. Tout le monde est d’une certaine façon en représentation.»
L’humoriste, qui décrit ses anciens collègues de La Haye comme des gens « avec beaucoup d’humour» regrette-t-elle son choix? « Pas du tout!, assure-t-elle. Ça m’a apporté quelque chose d’inestimable : la liberté. »
Interrogée par Droit-inc sur l’affaire Mike Ward, Jess Salomon a une position claire. « Ce n’est pas mon envie, faire de l’humour sur le physique des gens, ce n’est pas quelque chose que je fais », déclare-t-elle. Mais elle est formelle, « pour moi, l’humour ne peut pas être quelque chose qui est jugé au tribunal. Cela doit rester dans la sphère de l’opinion publique. Les gens doivent exprimer leur désaccord, le faire même dans les journaux. Il peut y avoir des débats, mais ça ne devrait pas être quelque chose qui relève de la justice. »