Reportages

Le cabinet de mes ancêtres

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Daphnée Hacker-b.

2013-03-26 15:00:00

Que faire lorsqu’on se sent appelé par le cabinet fondé par nos ancêtres, mais déserté par nos parents? On y retourne! Rencontre avec l’arrière-petite-fille de Monette Barakett.
Alice Monet s'est sentie appelée par le cabinet qui compte parmi ses clients l'archevêché catholique de Montréal ainsi que presque tous les établissements de santé et services sociaux de l'île.
Alice Monet s'est sentie appelée par le cabinet qui compte parmi ses clients l'archevêché catholique de Montréal ainsi que presque tous les établissements de santé et services sociaux de l'île.
Ce n’est pas son père, ni son grand-père, mais bien son arrière-grand-père Gustave Monette, qui a fondé avec Ezioff Patenaud un petit bureau d’avocats il y a 100 ans, aujourd'hui connu sous le nom de Monette Barakett.

Quatre générations plus tard, avec un « te » en moins, Me Alice Monet fait son entrée dans la firme de ses ancêtres, qui regroupe plus de 25 juristes.

Contre toute attente, elle renoue ainsi avec une tradition familiale de droit rompue lorsque son père a décidé de ne pas devenir avocat.

« Je me rappelle encore à quel point j’ai ressenti de la timidité à me diriger vers le kiosque de Monette Barakett lors de la journée carrière à McGill », raconte Me Monet en regardant par la fenêtre de son bureau les flocons tourbillonnés dans le ciel du 21e étage de la place du Canada.

Il ne manque pas de travail chez Monette Barakett, l'un des plus anciens cabinets francophones en Amérique du Nord.
Il ne manque pas de travail chez Monette Barakett, l'un des plus anciens cabinets francophones en Amérique du Nord.
Pourquoi se sentir intimidée de travailler pour la firme pour laquelle son grand-père et arrière grand-père ont dévoué leur vie? « Je ne voulais pas être privilégiée et je voulais surtout faire mes propres choix, sans me sentir obligée de travailler dans ce cabinet à cause de l’histoire qui m’y liait », admet sur un ton déterminé l’avocate de 27 ans.

Mais voilà qu’elle découvre ses « affinités naturelles » avec le bureau, dont son grand-père lui a rarement parlé. C’est que Gustave Monette junior tenait à garder une séparation entre sa vie professionnelle et familiale, explique sa petite-fille, qui a davantage comme souvenir les nombreuses toiles colorées réalisées par Me Monette que ses péripéties d’avocat.

Curieuse d’en savoir plus sur le cabinet, elle se décide à soumettre sa candidature. Alors qu’elle est séduite par l’équipe d’avocats qu’elle rencontre, ceux-ci s’illustrent autant dans des secteurs qui l’attirent, le public et le parapublic. Les juristes de Monette Barakett pratiquent aussi dans les domaines en haut de sa liste : le droit de la santé, le droit du travail et le litige civil.

Telle une vocation, Me Monet raconte cette sensation de « s’être sentie appelée » par le cabinet familial, où elle travaille depuis plus de trois ans.

Monette ou Monet?

Gustave Monette, l'arrière-grand-père d'Alice, a fondé un petit bureau d’avocats il y a 100 ans
Gustave Monette, l'arrière-grand-père d'Alice, a fondé un petit bureau d’avocats il y a 100 ans
Comment éviter de poser la question du changement de nom? « Ah! Celle-là il n’y a pas un client qui ne la pose pas! » dit-elle en rigolant. À l’aube de la Révolution tranquille, explique-t-elle, ses grands-parents ont senti le désir de renouer avec le nom de famille d’origine, Monet, issu d’une mentalité plus libérale et progressiste que Monette, qui avait une tradition idéologique plus conservatrice.

Me Gustave Monette père s’inscrivait hautement dans cette tradition : lui qui a posé sa candidature pour le parti d’Henri Bourassa dans les années 30, a ensuite été bâtonnier du Québec puis nommé au Sénat par le gouvernement Diefenbaker en 1957. Plaideur reconnu devant les tribunaux, il a eu comme mandat de représenter Maurice Duplessis pour des causes constitutionnelles.

« Jusqu’à la toute fin de sa carrière, mon arrière-grand-père a joué un rôle incontournable dans la notoriété du cabinet. Son fils a été encouragé à jouer le même rôle », souligne Alice Monet.

Alors que le fondateur se retire du cabinet au début des années 60, son seul fils (d’une famille de 7 filles) Gustave Monette junior, se retrouve en plein cœur des réformes sociales qui débouchent sur la création des établissements de santé. Le cabinet qui avait parmi ses clients de nombreuses communautés religieuses est naturellement devenu partenaire des pionnières du réseau de la santé.

Quand on a le choix d’être avocat

Me Alice Monet a comme souvenir d'enfance son grand-père Gustave Monette junior entrain de peindre ces toiles colorées.
Me Alice Monet a comme souvenir d'enfance son grand-père Gustave Monette junior entrain de peindre ces toiles colorées.
« Mon père a été le premier d’une longue lignée a avoir le choix de faire autre chose que d’être avocat. Moi je suis la première à faire le choix de l’être! » lance Me Monet, fière de son parcours qui l’a ramené sur le chemin de ses aieux.

Les changements d’époque, de noms et de professions au sein de sa famille n’ont pas eu raison du cabinet qui a célébré ses 100 ans l’an dernier et qui résiste encore aux vagues de fusions et d’acquisitions.

Si Monette Barakett est encore un cabinet incontournable dans le réseau de la santé et de la sécurité au travail, « c’est grâce à tous les professionnels qui s’investissent dans cette entreprise », insiste Me Monet, qui ne pense pas que son nom de famille devrait lui donner plus de mérite que les autres.

« C’est bien de considérer l’héritage du passé, mais nous sommes résolument tournés vers l’avenir » conclut-elle en faisant un clin d’œil au slogan du cabinet.
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