Le juge Robert favorable à une réforme du système de justice québécois

Raynaldo Marquez
2007-09-24 08:49:00
Résultat : seules les grandes entreprises et la population plus fortunée, qui disposent d’importants moyens financiers, peuvent recourir plus facilement aux tribunaux. Ce qui n’est pas le cas pour la majorité des Québécois, a-t-il déploré.
Selon le juge Robert, cette réforme pourra être menée avec succès à condition que tous les acteurs du système judiciaire, dont les avocats, mettent l’épaule à la roue.
« Les avocats ont tort de croire que cette réforme est contre leurs intérêts financiers et corporatistes. C’est plutôt le contraire : les changements proposés favoriseront les avocats », a-t-il dit.
Les membres de la profession ont plutôt intérêt à identifier des pistes de solutions de manière à éviter qu’une réforme soit imposée en leur défaveur, croit le juge. Dans le cas échéant, « les premiers à souffrir seront les avocats », a-t-il lancé.
Le juge Robert a tenu ces propos à titre de conférencier invité, lors du lancement officiel des activités de la coalition Uni-Accès, le 12 septembre, à l’Université du Québec à Montréal (UQÀM).
Cette coalition, dont le mandat est de favoriser à la population l’accès à la justice, depuis les campus universitaires, est une initiative conjointe des étudiants des facultés de droit de l’Université de Montréal, McGill et l’UQÀM.
Réforme souhaitée
Michel Robert est d’avis que cette réforme devrait se traduire, entre autres, par une hausse substantielle des seuils d’admissibilité à l’aide juridique, dont bénéficient surtout les plus démunis, afin de la rendre accessible à la majorité.
« Lorsque le système de justice se fait peu accessible à la classe moyenne, qui est pourtant le principal bâilleur de fonds de ce système, il faut s’inquiéter. »
Parmi les autres éléments de cette réforme, M. Robert penche aussi en faveur d’accorder un plus large pouvoir d’intervention aux juges, lors du déroulement des instances.
Cela aurait pour résultat d’accélérer les délais des procès et d’éviter qu’une autre affaire à l’image de Castor Holdings se répète.
Cette affaire, considérée comme la plus longue des annales judiciaires canadiennes, a duré 10 ans devant la Cour supérieure du Québec, avant d’avorter la semaine dernière.
L’affaire, qui a occupé la quasi-totalité de la carrière de juge Paul Carrière, devra être reprise à zéro.
Elle oppose des investisseurs qui ont perdu 600 millions en 1992 dans la faillite de Castor, une société immobilière, ce qui représente aujourd’hui 1,5 milliard.
L’exemple de l’Ouest
Le juge a aussi identifié d’autres pistes de réformes pour le Québec en se penchant sur les conclusions du rapport Brenner, sur la réforme du système de justice en Colombie-Britannique, publié en novembre 2006.
Parmi celles-ci, le juge Robert propose qu’avant de mettre en branle le système judiciaire, les parties aux litiges se rencontrent lors d’une réunion formelle.
L’objectif de cette réunion serait de mieux identifier les problèmes à résoudre, explique le juge, qui siège aussi comme médiateur à la Cour d’appel.
« Nous nous sommes rendus compte que dans les affaires de divorce, il arrive que le litige ne porte pas sur la garde des enfants ni sur la pension familiale. »
« Le litige porte plutôt sur des affaires plus triviales comme celles du manque d’hygiène de l’un des deux partenaires », illustre-t-il.
« Souvent, une fois cet aspect réglé le reste du conflit est réglé », assure le magistrat.
Le fait qu’une minorité de litiges, tant civils que criminels, se soldent par un jugement, est un facteur qui milite en faveur de ce genre de mode alternatif de résolution de conflits, dit-il.
''Raynaldo Marquez'' est journaliste et étudiant en droit à l'Université de Montréal