Agression sexuelle: l’avocat sera t-il accusé?

Agence Qmi
2014-01-07 15:00:00

«Il va prendre connaissance de la lettre et le ministre espère lui répondre d’ici à une semaine», a expliqué l’attachée de presse du ministre, Sarah Magnan.
Toutefois, elle a mentionné que son patron avait l’habitude de garder une distance avec le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) et qu’il n’était jamais intervenu dans les dossiers individuels.
«Depuis 2007, le Directeur des poursuites criminelles et pénales est indépendant pour s’assurer qu’il n’y ait pas d’ingérence politique dans les dossiers criminels. Ce qui est bien d’ailleurs.»
Néanmoins, le cabinet du ministre pourrait demander qu’il y ait une révision de la part du DPCP et que le dossier soit complètement réévalué. «C’est la seule intervention que le ministre peut faire», a fait savoir Mme Magnan.
Décision indépendante

«Les enquêteurs au dossier auraient mentionné que la preuve était crédible et que son témoignage semblait véridique. Cependant, la Couronne a tout de même refusé de porter des accusations criminelles contre son présumé agresseur. On ne discute pas de la trame factuelle, car c’est confidentiel, et il n’y a pas d’accusations criminelles», a souligné Jean-Pascal Boucher, porte-parole du DPCP.
Est-ce qu’un procureur peut être influencé? «Une chose qui est importante, c’est l’indépendance des procureurs. Et pour nous, c’est sacré. Les procureurs travaillent sans pression extérieure, sans avoir à se soucier de se faire dicter la façon de mener un dossier, a assuré M. Boucher. Ça serait inadmissible qu’une personne extérieure puisse faire modifier l’analyse d’un dossier.»
Admissible en droit
Selon le DPCP, chaque cas de dénonciation d’agression sexuelle est un cas d’espèce et est traité différemment.
«Le travail des procureurs, c’est d’abord d’analyser les enquêtes qui sont soumises par les policiers de façon juridique. Les procureurs se doivent d’être moralement convaincus qu’une infraction a été commise et être raisonnablement convaincus de pouvoir établir la culpabilité du prévenu», a expliqué M. Boucher.
Un recul estime une association de victimes

Alain Fortier, du mouvement Victimes d’agressions sexuelles au masculin, s’offusque que les victimes ne sont pas protégées «encore une fois» par le système judiciaire québécois.
«Lorsqu’on voit une situation comme celle de Marie-Renée Baillargeon, on se questionne si ça vaut la peine de dénoncer, a-t-il expliqué. Dans le fond, en tant que victime, ça ne donne pas le goût de dénoncer, de crainte que la Couronne ne dépose pas d’accusations.»
Selon lui, presque tous les dossiers d’agressions sexuelles tiennent sur le témoignage des victimes. À la lumière de la décision de la Couronne dans le dossier Baillargeon, les victimes dont les preuves ne tiennent que sur la parole risquent de ne jamais dénoncer les actes de leurs agresseurs, signale M. Fortier.
«Si on a des preuves témoignées qui sont moindrement sérieuses, on n’a pas le choix d’aller de l’avant. Ne pas être crue, c’est comme une deuxième agression que subit la victime», explique l’homme, qui prétend s’être fait agresser deux fois dans sa vie.
Influence?
L’influence que pourrait avoir un tiers sur la Couronne à cause de son statut public inquiète aussi le mouvement. «Si on fait toujours ça de cette manière, on n’accusera plus personne, illustre le porte-parole. Tout le monde peut être une victime de quelqu’un d’autre, nonobstant son statut.»