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Une défense «frivole», «vexatoire» et «abusive»

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Jean-francois Parent

2018-11-27 13:15:00

Censé protéger le public, le Fonds d’assurance responsabilité des notaires a refusé de se rendre. Même à l’évidence.
La juge Johanne Brodeur a condamné le Fonds à réparer ses erreurs
La juge Johanne Brodeur a condamné le Fonds à réparer ses erreurs
Un couple de retraités aux prises avec un notaire ayant commis—et admis—plusieurs fautes bataille ferme depuis des années pour récupérer son dû.

La Cour supérieure vient de décider que la comédie a assez duré.

Estimant que le Fonds d’assurance responsabilité professionnelle de la Chambre des notaires a présenté une défense « abusive », en plus de soutenir des arguments « frivoles et vexatoires », la juge Johanne Brodeur tance vertement le Fonds et le condamne à réparer ses erreurs.

Ce dernier était représenté par Me Mireille Brosseau, de Colas Moreira Kazandijan Zikovski. Elle n’a pas répondu rapidement à nos demandes de commentaires.

Lorsque le couple Lisa Gauthier et Benoit Babin veut acquérir un condo dans un nouveau projet immobilier près de Magog, ils font appel au notaire Jean-Philippe Gérin. Ce dernier, vivant dans l’une des unités du projet Club Vacances Magog ciblé par le couple, conclut la vente en 2008.

Le couple acquiert le pavillon des ventes du projet, et entend y emménager lorsque toutes les unités seront vendues. Cela survient en 2011.

De même que le cauchemar du couple.

Un notaire fautif

Ceux-ci ont en effet acheté une unité zonée commerciale, et faisant partie des lieux communs du projet immobilier.

Lors de la transaction actée par le notaire Gérin, tant le promoteur qui vend son bureau des ventes que les acheteurs « croient avoir transféré en pleine propriété l’entièreté du lot [...]. Il n’est nullement mention du fait que le lot [...] est désigné comme partie commune d’une copropriété divise ».

Ce qui n’est pas le cas, et le notaire Gérin « admettra, lors du procès, qu’il n’a simplement pas vérifié les titres », observe la juge Brodeur dans sa décision condamnant le Fonds à rembourser quelque 400 000 dollars au couple, dont 50 000 dollars en dommages punitifs.

Ils étaient représentés par Me Stanislas Bricka, du cabinet éponyme. Me Bricka n’a pas répondu rapidement à nos demandes de commentaires.

Le notaire Gérin a pourtant maintes fois admis ses torts, ce qui aurait normalement dû déclencher la procédure de remboursement de l’assureur.

Ce qui fait que les deux retraités habitent illégalement depuis sept ans une aire commune : les autres copropriétaires y entrent et sortent, se servant également du terrain pour des projets communs comme des stationnements ou des plates-bandes.

D’autres notaires sont plus sérieux

Car certains des propriétaires ont acheté leur condo en faisant affaire avec des notaires qui savent ce qu’ils font. Et qui inscrivent le condo des Babin-Gauthier comme aire commune. Sans savoir que les deux retraités y habitent, sur la foi d’un acte de vente vicié, courtoisie du notaire Gérin.

De fil en aiguille, la situation s’envenime au point où les positions se campent : le syndicat de copropriété est aux prises avec un terrain qu’il ne peut utiliser, le promoteur des unités de condos ne peut vendre son terrain, et le couple Babin-Gauthier finance une résidence qui ne lui appartient finalement pas.

Le tout, rendu possible avec le concours du notaire Gérin. Au fil des ans, il propose de rectifier le tir en corrigeant les actes de ventes, en prenant des engagements et surtout en arrêtant de dire une chose et de faire son contraire.

Mais c’est trop peu. Trop tard. Le couple Babin-Gauthier met le notaire et son assureur en responsabilité professionnelle le Fonds de régler la situation et de les indemniser.

S’ensuit une autre série de problèmes pour les retraités, qui passent près d’y laisser leur santé.

Au point où la juge Brodeur « déclare abusive la contestation » du Fonds et le condamne solidairement avec le notaire Gérin à quelque 400 000 dollars, dont 50 000 en dommages punitifs.

Tous les moyens de défense sont bons

Le Fonds fait ainsi traîner les choses en longueur et propose des solutions qui n’aboutiront jamais, parce que impossibles à mettre en œuvre. Ainsi, même s’ils savent « que les droits sont litigieux et la procédure contentieuse », ils proposent des compromis en étant « tout à fait conscients des effets de leurs demandes sur les droits des tiers ».

L’avocate du Fonds, Mireille Brousseau, devait « invoquer tous les moyens de défense » possibles pour représenter son client, relève la juge Brodeur.

Une des solutions proposées lors des négociations d’avant-procès a été d’annuler la vente. Mais cela aurait nécessité l’approbation du Fonds, qui refuse parce que « l’annulation de la vente compliquera l’exercice de son droit à la subrogation », constate la juge Brodeur.

Selon les états financiers du Fonds pour 2017 et 2018, ses activités d’assurance sont déficitaires pour les deux années. Ainsi, les charges excèdent les produits d’environ 1,5 million de dollars pour chacune des deux années.

« Le Tribunal conclut (...) que la seule préoccupation du Fonds est d’éviter tous déboursés et le cas échéant tout faire pour pouvoir les récupérer, écrit la juge Brodeur, selon qui assureur (…) ne peut afin d’arriver à ses objectifs abuser de son droit, s’opposer de manière frivole et vexatoire et manœuvrer pour faire écouler du temps. »

Pour la Cour supérieure, « la faute commise à l’occasion du recours judiciaire découle d’un comportement contraire aux finalités du système judiciaire ».
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6 commentaires
  1. Anonyme
    Anonyme
    il y a 5 ans
    Ce jugement est encore trop timide
    "L’avocate du Fonds, Mireille Brousseau, devait « invoquer tous les moyens de défense » possibles pour représenter son client, relève la juge Brodeur."


    "devait" peut vouloir dire "était obligée de", mais peut également signifier "a agit de manière à". Vu le reste du jugement, c'est évidement le second sens qui est ici applicable.

    L'avocate du Fonds n'était certainement pas obligée de mettre de l'avant une défense sans fondement, et il est à espérer que le syndic sévisse.

    Quant aux 50 000$ accordés pour avoir fait trainer la procédure pendant 10 ans, au détriment de personnes d'age avancé en plus, ça ne va pas convaincre les assureurs, et les défendeurs en général, de cesser les stratégies dilatoire. ça fait 5000$ par an, dépensé pour ne pas couvrir un assuré.

    La juge aurait dû accorder à ce titre, au minimum, le montant des honoraires et des débours versé à l'avocate de l'assureur, le montant des honoraires et débours encourus par les personnes flouées, et le rendement sur le capital gagné par l'assureur en retardant un paiement de 350k$ pendant 10 ans. Dans le cas des assureur le code devrait d'ailleurs prévoir une pénalité dissuasive pour les assureurs qui succombent.

  2. CFF
    Wow
    Tough judgment, a good read. Me Brosseau is an excellent attorney, nevertheless. She had a mandate, and she respected it.

    http://canlii.ca/t/hw0nv

    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 5 ans
      You got your law degree from Cracker-Jack(tm) University ?
      "She had a mandate, and she respected it."

      Wow indeed ! With such an impressive legal stance, don't be surprised if on day you get disbarred !

    • CFF
      Disbarred
      You can refuse a mandate if you aren't comfortable with it, but the problem begins when lawyers such as yourself feel that a defense is "unprobable" and/or borderline "abusive", whatever it means, and push your client to adopt your point of view regarding the file.

      I have no problem with you refusing these files, I'll be glad to take them over and respect the client's wishes, but you'd be surprised how many times I thought a defense was on shaky grounds at the very best, and abusive at its worse, and it still worked on technicalities.

      It doesn't always take much to grab a judge's attention to details, especially when one wants to get rid of the case for other motives, and the same works the other way around.

      There is one thing much, much worse than getting condemned to punitive damages (especially when the client is aware of it), and it's a judgment in which the judge said he would've/could've rejected the action for other motives, but it wasn't pleaded, therefore the judge shall not rule on said motives.

      THERE, especially if your client recommended you to plead said defense that you deemed "possibly abusive", you would face a chance to be disbarred.

      Never forget you're here to represent your client, and defend it until there is no more breath in your lungs and your robes are in tatters. If you can't do it, then you're a bad lawyer.

  3. Dan
    Disbarred?
    Since when do you get disbarred for representing a client what is this lol.

  4. GC
    Effet dissuasif?
    Les dommages punitifs n'auront aucun effet dissuasif.

    Le rendement moyen des obligations canadiennes à court terme au cours des 10 dernières années a été de 2,33%, ce qui signifie que le 350 000$ a rapporté environ 90 000$ au Fonds.

    Il est probable que le rendement soit bien plus grand en réalité, puisque le Fonds détient sûrement des placements avec de meilleurs rendements; le gain se situe probablement entre 100 000$ et 150 000$.

    En plus, retarder le paiement les aide avec leurs problèmes de liquidité.

    C'est sans compter qu'en agissant ainsi, le Fonds multipliait ses chances de régler à rabais.

    Bref, meilleur scénario pour eux, régler à rabais, pire scénario, obtenir un gain financier (rendement moins dommages punitifs).

    Effet dissuasif vous dites?

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