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Demande d’action collective d’Autochtones contre la SQ de Val-d’Or

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Radio -Canada

2021-12-15 13:15:00

Le Centre d’amitié autochtone de Val-d’Or vient de déposer une demande d’action collective contre le gouvernement du Québec. Qu’en est-il ?
Me Bruce Johnston, Me Jean-Marc Lacourcière et Me Lex Gill. Sources: Site web du cabinet Trudel Johnston & Lespérance et du Centre d’amitié autochtone de Val-d’Or
Me Bruce Johnston, Me Jean-Marc Lacourcière et Me Lex Gill. Sources: Site web du cabinet Trudel Johnston & Lespérance et du Centre d’amitié autochtone de Val-d’Or
Le Centre d’amitié autochtone de Val-d’Or a déposé une demande d’action collective contre le gouvernement du Québec. Cette action collective vise à dénoncer les pratiques discriminatoires et les abus envers des personnes autochtones qu'auraient commis certains agents de la Sûreté du Québec de Val-d’Or.

Me Bruce Johnston, Me Jean-Marc Lacourcière et Me Lex Gill du cabinet Trudel Johnston & Lespérance représentent le demandeur dans ce dossier.

Des compensations sont exigées pour les personnes qui sont présumées victimes de ces gestes.

« Durant une période s’échelonnant sur plusieurs décennies, des agents de la Sûreté du Québec se sont livrés à des exactions sur plusieurs citoyens autochtones résidant sur le territoire présentement désigné comme la MRC de la Vallée-de-l’Or », précise la demande d'action collective menée par le cabinet Trudel Johnston & Lespérance (TJL).

« Le gouvernement du Québec est tenu de réparer les préjudices causés, puisqu’ils ont été commis par des agents en fonction alors que les cadres de la SQ avaient connaissance de ces pratiques », a déclaré le Centre d’amitié.

De plus, la poursuite estime que le gouvernement est aussi responsable, puisque ces pratiques constituent, selon le centre, des violations des chartes canadienne et québécoise des droits et libertés.

Sont concernées par cette demande « toutes les personnes autochtones qui affirment avoir été victimes de pratiques discriminatoires par un ou des agent(s) de la Sûreté du Québec sur le territoire de la MRC de la Vallée-de-l’Or ».

Par pratiques discriminatoires, le cabinet précise notamment : des agressions sexuelles, physiques, des séquestrations, des sollicitations de faveurs sexuelles, l’utilisation de la force excessive dans le contexte d’arrestations et le harcèlement.

Le document stipule que les « victimes autochtones des agents de la SQ ont été ciblées en raison de la précarité élevée dans laquelle elles vivaient, elle-même le legs des politiques coloniales adoptées par les gouvernements du Canada et du Québec et entretenue par le racisme omniprésent dans leurs collectivités ».

Le cabinet indique que l’action collective concerne même des faits qui se sont déroulés il y a longtemps.

La victime A. est une plaignante qui porte l’action collective avec le Centre d'amitié. La femme de la communauté anishinabée de Lac Simon allègue avoir été agressée sexuellement en 1978 par le chef du poste de police de la SQ pour la Ville de Senneterre, qui lui aurait demandé avec insistance plusieurs faveurs sexuelles alors qu'elle était intoxiquée.

Selon le document, « les agressions sexuelles, l’abus de pouvoir et la séquestration commis par le policier à l’égard de A ont eu de graves conséquences à son endroit ». Sont évoqués une augmentation de la consommation de drogue et d'alcool, des problèmes de confiance, d'autres relations sexuelles fondées sur la contrainte... Elle aurait dû quitter sa région et sa communauté pendant 40 ans.

Le Centre espère que, de cette action collective, « émerge un sentiment de justice pour les personnes autochtones, des prises de conscience et d’éducation au sein des corps policiers de la province ainsi que des changements concrets et perceptibles au sein de la communauté de Val-d’Or ».

Un rebondissement dans une affaire sortie en 2015

L'annonce officielle en novembre 2016 du Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) de ne porter aucune accusation contre six policiers de la Sûreté du Québec (SQ) de Val-d'Or avait suscité colère, incompréhension et déception.

Les femmes autochtones de Val-d'Or avaient alors indiqué qu'elles songeaient à intenter d'autres recours juridiques.

Toute cette affaire est sortie en 2015. L'émission Enquête de Radio-Canada avait indiqué dans un reportage que des « femmes autochtones étaient à la merci de ceux qui devraient normalement les protéger à Val-d'Or ».

Pour la première fois, ces femmes avaient pris la parole publiquement pour dénoncer de présumés abus sexuels, de l’intimidation et d’autres comportements de la part de certains policiers de la Sûreté du Québec.

Dans la foulée, le gouvernement du Québec avait mandaté le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) pour enquêter sur les allégations d'abus révélés dans ce reportage de l'émission Enquête en octobre 2015 et sur toute plainte similaire visant des policiers de la Sûreté du Québec.

Le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) avait alors analysé 37 dossiers qui lui ont été remis par le SPVM.

Finalement, il a décidé de ne porter aucune accusation dans cette affaire, estimant qu’il n’y avait pas de preuves suffisantes pour porter des accusations de sévices sexuels, d'intimidation et d'abus de pouvoir contre les six patrouilleurs de la SQ suspendus dans la foulée du reportage.

Juste avant la décision du DPCP, l'observatrice civile indépendante désignée par Québec, Fannie Lafontaine, avait conclu à une enquête « impartiale », mais « insuffisante ». Elle avait d'ailleurs précisé à ce moment qu'elle serait « surprise qu'aucune accusation ne soit déposée ».

L'affaire est revenue sous la loupe de la Commission d'enquête sur les relations entre les Autochtones et certains services publics (commission Viens) en 2018.

Des sergents-détectives du SPVM y ont expliqué la difficulté de mener ce type d'enquête.

Plusieurs personnes étaient venues témoigner notamment de cure géographique, qui consiste à déposer des personnes intoxiquées à plusieurs kilomètres de la ville sous prétexte de les faire dégriser. Elles devaient revenir à pied, parfois en plein hiver.

Dans sa déclaration liée à la demande d'action collective, le Centre d'amitié de Val-d'Or reconnaît que « plusieurs mesures ont été mises en place par le gouvernement du Québec depuis 2015 ».

Il dit continuer de croire à leur portée et à leurs impacts positifs, mais le Centre conclut : « nous croyons aussi à la pluralité des moyens pour que les victimes obtiennent réparation ».

Selon le document, il ressort clairement des témoignages dans les médias et à la commission

Viens, ainsi que des enquêtes menées par le SPVM, qu'il y a au moins plusieurs dizaines de victimes. Mais ce chiffre est « vraisemblablement plus élevé », car le document fait part aussi d'une réticence généralisée à dénoncer.

Le cabinet d'avocat demande que l'action collective ne soit pas exercée dans le district de Val-d'Or, mais dans celui de Montréal. Il dit craindre que cela ravive les fortes tensions sociales qu'a connues région suite à la diffusion des reportages d'Enquête.

Il précise entre autres des climats d'intimidation au palais de justice, des actions de solidarité visibles envers les policiers et qu'une quarantaine d'agents du poste de Val-d'Or ont intenté une action en diffamation contre Radio-Canada en lien avec les reportages d'Enquête.

Le Procureur général du Québec est poursuivi en sa qualité de représentant du ministre de la Sécurité publique, sous l’autorité duquel agit la Sûreté du Québec.

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