La DG en fait-elle trop ?

Jean-Francois Parent
2015-09-03 15:00:00

L’implication de la directrice générale du Barreau, Me Lise Tremblay, dans le litige qui oppose le CA à la bâtonnière serait à classer dans la case échec estime Michel Nadeau. Le directeur de l’Institut sur la gouvernance des organisations publiques et privées (IGOPP) évoque « un cafouillage » en matière de gouvernance.
Dans un communiqué émis par le CA le 1er juillet dernier, Me Tremblay était citée à titre de porte parole de l’organe décisionnel de l’ordre.
Présente lors de la conférence de réglement à l’amiable organisée entre les parties et présidée par le juge François Rolland, la DG était aussi celle qui était assise aux côtés de Me Raymond Doray, l’avocat mandaté par le CA, lors de l’audition de l’ordonnance de sauvegarde demandée par Me Khuong et entendue par la Cour supérieure de Québec le 20 août dernier.
Autant d’accrocs aux règles de gouvernance établissant la séparation des pouvoirs, estime M.Nadeau. La séparation qui doit exister entre les administrateurs et la direction générale est pourtant l’une des pierres d’assise de la gouvernance des ordres professionnels au Québec. Cette gouvernance est d’ailleurs balisée, dans le cas du Barreau, par l’article 24 de la Loi sur le Barreau : la directrice générale est ainsi « responsable de l'administration et du fonctionnement du Barreau ».
« Du jamais vu »

« On innove en matière de gouvernance en désignant la directrice générale du Barreau comme porte-parole du conseil d'administration. Du jamais vu », écrivait-il récemment dans une lettre ouverte.
Partie prenante du conflit, son devoir de réserve est ainsi relégué au second plan, poursuit Nadeau. Alors qu’elle est imputable envers le CA du Barreau, voilà qu’elle tient un rôle de premier plan dans l’affaire.
À l’opposé, le président de Lacroix Groupe conseil, le spécialiste de la gouvernance Hugues Lacroix, se veut plus conciliant. « Le Barreau a agi au mieux dans le contexte », dit celui qui a agi comme consultant auprès du Conseil interprofessionnel lors des récentes consultations sur la gouvernance des ordres professionnels.
Parer à une situation urgente

Il fait remarquer qu’on a corrigé la situation depuis, puisque c’est maintenant Me Louis-François Asselin, vice-président devenu bâtonnier par intérim, qui représente le Barreau. « On vient de revoir toute la gouvernance, après plusieurs années de réflexion. J’ai de la difficulté à croire que le CA a commis autre chose qu’un péché véniel en confiant des pouvoirs à Lise Tremblay », dit-il pour faire le parrallèle avec la conduite de la bâtonnière qui constitue selon lui un « péché mortel ». Selon lui, Me Khuong avait le devoir de divulguer l’évènement survenu au magasin Simons de Laval.
Michel Nadeau, lui, considère que la situation dans son ensemble relève de l’improvisation. « La directrice générale est défenderesse à la procédure de par sa faute. Le conflit touche l’univers des administrateurs, elle n’avait pas à s’impliquer », souligne-t-il, en faisant référence au fait que la DG est poursuivie personnellement par Me Khuong qui lui réclame d’ailleurs des dommages.
Elle aurait donc enfreint, de concert avec le CA d’ailleurs, certains des principes de la bonne gouvernance. Si la bâtonnière est réintégrée dans ses fonctions, il sera difficile à Me Tremblay de poursuivre son travail, conclut M.Nadeau.
« Il ne sera pas plus facile à la bâtonnière de faire son travail dans ces conditions », rétorque pour sa part M.Lacroix.
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