Manoir Liverpool : les ministres Blais et Dubé visés par une poursuite de 6M $
Radio -Canada
2022-02-08 10:15:00
Claude Talbot et Manon Belleau « ont subi des dommages et des inconvénients considérables allant de pertes financières importantes à des relations de confiance brisées et une réputation (...) à tout jamais entachée », peut-on lire dans la poursuite en dommages et intérêts totalisant 6 175 000 $ déposée en Cour supérieure.
À noter que M. Talbot et Mme Belleau sont représentés par l’avocat Jean-François Bertrand, qui dirige sa propre étude légale à Québec.
Les deux anciens propriétaires de la résidence privée pour aînés (RPA) de Lévis font surtout référence à un rapport du CISSS de Chaudière-Appalaches rendu public en février 2021. Le document faisait état de maltraitance et de négligence qui perdurait au Manoir Liverpool depuis au moins cinq ans.
Ce rapport confirmait d’ailleurs la quasi-totalité des conclusions d’une enquête menée par Radio-Canada presque un an plus tôt.
Or, M. Talbot et Mme Belleau reprochent au CISSS de Chaudière-Appalaches d'avoir brisé une entente de confidentialité en publiant « illégalement » ce rapport aux « informations erronées », peut-on lire dans la poursuite.
« Pour Manon Belleau et Claude Talbot, les mois de janvier 2021 à aujourd’hui ont été particulièrement difficiles alors qu’ils ont vécu un stress et une anxiété immenses en plus de sentiments d’injustice et d’impuissance notoires », indique la demande introductive d’instance déposée le 28 janvier dernier en Cour supérieure.
Selon les demandeurs, la diffusion de ce rapport a entraîné le retrait d’une offre d’achat de 20,5 millions de dollars pour le Manoir Liverpool, car en « redorer l’image » aurait nécessité un « travail colossal » de la part de l'acquéreur intéressé.
Le Manoir Liverpool a finalement été vendu 15 millions de dollars, indiquent les demandeurs, ce qui constitue une perte de 5,5 millions de dollars à leurs yeux.
Des propos « péjoratifs et diffamatoires »
Outre les agissements du CISSS de Chaudière-Appalaches, la poursuite met aussi en cause le comportement de la ministre responsable des Aînés, Marguerite Blais, ainsi que du ministre de la Santé et de Services sociaux, Christian Dubé.
Les plaignants reprochent aux deux élus d’avoir tenu « de nombreux propos péjoratifs et diffamatoires » à leur égard.
Ils font notamment référence à une conférence de presse où le ministre Dubé se demandait comment les propriétaires du Manoir Liverpool avaient pu faire « autant d’entourloupettes » pendant des années.
Ils dénoncent aussi les propos de la ministre Blais qui, après avoir pris connaissance du rapport du CISSS de Chaudière-Appalaches, l’avait qualifié d’« accablant ». Elle avait aussi dit ne « pas comprendre qu’on puisse négliger des personnes de cette façon-là », en référence directe aux soins offerts au Manoir Liverpool.
« Ces propos, conjugués au bris de confidentialité qui a entraîné la publication d’un rapport aux informations erronées quant à la réalité vécue au Manoir ont eu pour effet de porter atteinte à la réputation, à l’honneur, à l’intégrité et à la dignité des Demandeurs », ajoute la demande.
M. Talbot et Mme Belleau disent aussi avoir subi « une perte de confiance et d’estime de leurs partenaires d’affaires, proches et connaissances ».
Pas de commentaires
Sans surprise, les parties visées par la poursuite préfèrent garder le silence. Par courriel, le ministère de la Santé et des Services sociaux a simplement dit qu'il « n'émettra aucun commentaire à ce sujet, en respect du processus judiciaire en cours ».
Également par courriel, le CISSS de Chaudière-Appalaches a fourni une brève réponse presque identique.
Ce n'est d'ailleurs pas la première fois que les ex-propriétaires du Manoir Liverpool poursuivent le CISSS. L'an dernier, presque à pareille date, ils avaient intenté une poursuite de 700 000 $, reprochant au CISSS d'avoir produit une « enquête bâclée ».
Depuis l'achat du Manoir Liverpool par le Groupe Ébèn, au printemps 2021, l'endroit a été renommé Résidence Saint-Antoine.