Un associé, ça gagne combien?

Pierre Arcand
2012-10-09 08:30:00
Bonjour,
J’ai 6 ans de pratique et mon boss me propose de m’associer avec lui. Je me demande combien je devrais demander comme salaire. Pouvez-vous m’aider ?
Réponse
Cher lecteur,
Vous me donnez bien peu d’information pour que je puisse vous aider. Je vais donc me contenter de vous dresser les grands principes de la rémunération des associés.
Premièrement il faut préciser si vous serez associé avec participation (equity partner) ou sans participation (non-equity).

Vous parlez de votre boss au singulier alors je comprends que vous êtes dans un petit cabinet. Le statut d’associé avec participation, bien qu’alléchant, ne devrait jamais être accepté les yeux fermés. Idéalement vous devriez commencer par un statut d’associé sans participation mais avec plein accès aux chiffres de l’entreprise. Le statut participatif implique votre responsabilité financière, il faut que vous en soyez conscient. D’autant plus que vous serez vraisemblablement minoritaire donc aurez un contrôle très relatif sur les décisions financières telles que la distribution des profits ou les dépenses de développement. Des cabinets mal gérés, il y en a plusieurs et vous ne voulez pas vous placer dans une situation ou vous devrez payer pour les erreurs de votre boss. Avant d’accepter, il faut vous doter d’une convention qui vous protégera en vous donnant un certain contrôle malgré votre statut minoritaire. Vous êtes avocat alors vous comprenez le principe, reste à éviter d’être un cordonnier mal chaussé.
Les mises en garde étant faites, passons à la rémunération. Il faut comprendre qu’un associé avec participation, bien qu’il existe des situations mitoyennes, n’a pas de salaire fixe. Ce qu’il reçoit est entièrement tributaire des profits du cabinet, il n’a pas non plus de revenu garanti. En début d’année, on détermine la part de chacun en donnant des points de participation qui sont en fait un pourcentage des profits. Dans votre cas, ce pourrait être 30% pour vous et 70% pour votre boss. Ensuite on estime les profits de l’année qui vient, souvent en fonction du dernier exercice financier.
Si on anticipe des profits de 300 000$, on estimera que votre part sera 90 000$ et on vous fournira des avances de façon bihebdomadaire. Ces avances ne représenteront pas 100% de votre part, car on veut notamment éviter que les associés soient obligés de rembourser à la fin de l’exercice, des sommes perçues en trop. On utilisera aux fins des avances, entre 60% et 75% de l’estimation de votre part soit dans l’exemple présent environ 60 000$. Par la suite, la majorité des cabinets vont remettre à leurs associés des ajustements aux trois ou six mois, afin d’ajuster les avances en fonction des revenus réels. Ces ajustements vont souvent servir à payer les acomptes provisionnels qui doivent être versés au gouvernement en prévision des impôts que les associés devront payer en fin d’année. Dans le même ordre d’idée, l’ajustement final en fonction des revenus réels se fait habituellement en mars ce qui correspond à la période des impôts. Je vous rappelle que pour tous ces calculs, on utilise le travail facturé et payé car tant et aussi longtemps que l’argent n’est pas dans les coffres, il ne peut pas être distribué.
Voilà pour le cours rémunération 101. Comment savoir ce qu'est votre juste part des profits ? Dites-vous que s’il vous reste dans vos poches entre 40% et 50% de ce qui vous générez, le partage semble adéquat. Il faut cependant noter que le tout est sujet à un nombre incalculable de facteurs et que ces facteurs expliquent pourquoi les cabinets ont tous des façons différentes d’octroyer les points de participation. Il n’y a malheureusement pas d’équation universelle. C’est d’ailleurs probablement la plus grande source de discorde chez les avocats, et un perpétuel casse-tête pour les associés directeurs.
J’espère que ma réponse vous aidera dans votre démarche et je vous souhaite une bonne semaine.
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Sur l'auteur
Pierre Arcand s'est spécialisé en recrutement juridique après avoir pratiqué le droit pendant une douzaine d'années. Ayant été associé au sein de cabinets boutiques ainsi que d'un important cabinet de Montréal, il connaît bien la communauté juridique et les enjeux reliés à la pratique du droit tant en cabinet qu'en entreprise. Arcand et Associés, une entreprise spécialisée dans le recrutement de cadres et de professionnels, a été fondée en 1999. Pierre Arcand et son équipe apporte un soutien professionnel tant aux entreprises qu'aux cabinets qui cherchent à recruter les meilleurs candidats disponibles.