Les notaires veulent dépoussiérer le droit de la famille, désuet
Delphine Jung
2018-04-17 11:15:00
« Après l’affaire très médiatisée d’Éric et Lola, les juristes ont compris que le droit québécois n’était plus adapté aux réalités familiales. Dans la décision du tribunal, il est d’ailleurs important de noter qu’il y avait quatre juges dissidents sur les neuf », explique Me François Bibeau, président de la Chambre des notaires.
En 2013, le plus haut tribunal du pays avait rejeté la cause d'une plaignante, Lola, qui s'est adressée aux tribunaux pour contraindre son conjoint de fait, Éric, un homme d'affaires multimillionnaire dont elle était séparée, à lui verser une pension alimentaire pour elle-même et à lui remettre une part du patrimoine familial.
À la suite de cette affaire, de nombreux experts se sont prononcés sur l'urgence et l'importance de réformer le droit de la famille.
« Le droit de la famille est, quant à lui, resté figé dans le temps. Le statu quo n'est plus une option. C'est pourquoi nous voulons prendre le pouls de la population, de ses besoins et de ses enjeux afin d'alimenter et d'enrichir la réflexion et les travaux de réforme que le législateur devra forcément entamer », explique Me Bibeau.
« Cela fait longtemps qu’on parle d’une réforme du droit de la famille québécois qui est l’un des plus anachroniques au monde. Il repose en effet sur les fondements de la réforme de 1980, elle-même faite en fonction des réalités familiales des années 60-70. Aujourd’hui, nous sommes à des années lumières de ces anciens modèles familiaux », ajoute Me Alain Roy, coprésident de la Commission.
Cette Commission est la deuxième étape d’un processus normal de réforme. « Malheureusement, le gouvernement n’a jamais lancé ce genre de consultation citoyenne à la suite d’un premier rapport publié en 2015 », poursuit le coprésident.
« En cette année d’élections, le temps est propice pour remettre aux élus et à la population un rapport qui leur permettra de mieux comprendre les besoins des familles québécoises et d’agir! », dit encore Me Sylvie Schirm, commissaire.
« Nous avons pensé qu’en tant qu’ordre professionnel, nous étions bien positionnés pour lancer l’initiative d’une consultation citoyenne qui permettra de donner toutes les informations nécessaires au gouvernement pour réformer le droit de la famille », poursuit Me Bibeau.
C’est donc dans ce but qu’une Commission citoyenne sur le droit de la famille ira à la rencontre de la population dans six villes du Québec, et ce, du 14 mai au 19 juin prochain.
Tous les citoyens sont invités à participer, tant via le dépôt et la présentation d'un mémoire lors des auditions publiques que par le biais du site internet de la Commission: commissionsurledroitdelafamille.com.
Cette Commission sera composée de sept commissaires : Me Alain Roy, notaire et professeur à la faculté de droit de l'Université de Montréal et coprésident de la Commission, Me Jean-Paul Dutrisac, notaire et ancien président de l'Office des professions du Québec, deuxième coprésident de la Commission, Me Sophie Gagnon, avocate et directrice générale de l'organisme Juripop, Me Marie-Ève Brown, notaire et présidente de l'Association de médiation familiale du Québec, Me Sylvie Schirm, avocate en droit de la famille, Schirm et Tremblay, Michèle Vatz-Laaroussi, professeure retraitée de l'École de travail social de l'Université de Sherbrooke et Henri Lafrance, président de Famille point Québec et de l'Association des grands-parents du Québec.