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L’avocat des causes impopulaires prend sa retraite

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Radio -Canada

2017-08-17 10:15:00

Les noms de ses clients donnent froid dans le dos… Mais l’avocat se retire avec le sentiment du devoir accompli...
Me René Duval
Me René Duval
En 41 ans de pratique, l'avocat René Duval a certes gagné des causes mémorables à la Commission canadienne des droits de la personne, mais c'est au cours des 10 dernières années qu'il s'est surtout fait connaître pour avoir défendu des gens ayant commis des crimes graves qu'aucun avocat ne voulait représenter.

À 70 ans, des ennuis de santé le forcent à prendre sa retraite plus tôt qu'il ne l'aurait souhaité.

Il rêvait de pratiquer le droit jusqu'à sa mort, mais la charge de travail et le stress sont devenus trop difficiles à gérer pour Me René Duval. Plaider devant la cour, c'est ce qui lui manquera le plus lance-t-il d'emblée.

« Pour continuer à plaider, il faudrait que je continue les autres aspects de la pratique et les autres aspects de la pratique vont me tuer c'est pas compliqué », dit Me Duval.

Celui qui prendra officiellement sa retraite le 30 mars ne s'en cache pas, en acceptant certaines causes, il a perdu de l'argent et d'autres dossiers l'ont emmené à recevoir des messages haineux. Il se retire malgré tout avec le sentiment du devoir accompli.

Par ailleurs, le constat de René Duval face aux changements au sein du système de justice au cours de sa carrière est dur. Il dénonce le volume de travail refilé aux avocat qui font grimper la facture des clients.

« L'accès à la justice, on repassera. C'est loin d'être gratuit. Je dénonce le fait qu'on essaie de dire aux gens qu'on veut rendre la justice accessible », dit l’avocat.

Causes marquantes

Parmi les victoires mémorables de sa carrière, il retient entres autres le jugement de la Commission canadienne des droits de la personne forçant Radio-Canada à étendre le sous-titrage à l'ensemble des émission de sa programmation.
Le triple meurtre de la rue Sicard, à Trois-Rivières, et le combat de la Trifluvienne Ginette Leblanc pour le suicide assisté sont cependant les deux causes qui l'ont touché le plus.

« Les enjeux humains étaient énormes dans ces dossiers-là. Beaucoup plus grands que tous les dossiers que j'ai pu faire en droit de la personne, explique-t-il. La voir (Ginette Leblanc) dépérir d’une visite à l’autre. Et s’asseoir, passer l’après-midi avec quelqu’un qui souhaite la mort, c’est pas nécessairement facile. »

René Duval a accepté de défendre la cause de Ginette Leblanc devant les tribunaux en 2011. La femme de Trois-Rivières, atteinte de la sclérose latérale amyotrophique (SLA), souhaitait mourir dans la dignité.

Des causes médiatisées et impopulaires

Originaire de Nicolet, au Centre-du-Québec, Me René Duval est revenu dans la région en 2004 pour une retraite anticipée après avoir pratiqué le droit dans la région de Montréal et en Ontario pendant de nombreuses années.

Rapidement, il s'est ennuyé de travailler et a commencé à défendre certains clients qui étaient, bien souvent, déjà jugés par le tribunal populaire. Une façon, dit-il, de donner au suivant.

« J'ai tout fait pour qu'au minimum leurs droits soient respectés. Quand je rencontrais un individu accusé de crime grave, je disais, moi je ne suis pas juge, je ne juge pas », dit Me Duval.

Il a défendu, récemment, l’assassin de trois jeunes de Trois-Rivières. Le 11 février 2014, deux soeurs et l'ami de coeur de l'une d'elles ont été froidement assassinés dans une maison de la rue Sicard, dans le secteur Trois-Rivières-Ouest. Me Duval a défendu l'un des deux coaccusés dans ce dossier, Cédric Bouchard. gé de 17 ans au moment des faits, il purge une peine de prison à vie sans possibilité de libération conditionnelle avant 10 ans.

« Ce qui a été difficile dans le triple meurtre, c'est l'âge des victimes et les circonstances. C'est un drame énorme pour les deux familles », dit Me Duval.
Il y en a eu d’autres.

Saïd Namouh, le « terroriste de Maskinongé » a été défendu par Me René Duval. L'homme d'origine marocaine a été condamné à la prison à vie sans possibilité de libération conditionnelle avant 10 ans.

Francis Proulx a été reconnu coupable du meurtre de Nancy Michaud, attachée politique du défunt ministre libéral Claude Béchard. Elle a été tuée le 15 mai 2008 à Rivière-Ouelle, près de La Pocatière. René Duval a accepté de défendre Francis Proulx à la Cour suprême du Canada.

Enfin Cathie Gauthier a été reconnue coupable des meurtres au premier degré de ses trois enfants. Le soir du drame, tous les membres de la famille avaient bu des boissons empoisonnées. Le conjoint de Cathie Gauthier, Marc Laliberté, est décédé lors des événements, alors que Mme Gauthier a survécu. Me Duval a défendu Cathie Gauthier à la Cour suprême du Canada.
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3 commentaires
  1. anonyme
    anonyme
    il y a 7 ans
    Seul le retraité peut....
    "L'accès à la justice, on repassera. C'est loin d'être gratuit. Je dénonce le fait qu'on essaie de dire aux gens qu'on veut rendre la justice accessible », dit l’avocat"

    Bravo pour le courage d'appeler un chat un chat. Il est aussi rassurant qu'il soit à la retraite car c'est le genre de propos qui amènent les sbires syndics du Barreau à se trémousser et à se lancer aux trousses des personnes qui osent critiquer des aspects du système de justice.

    La protection du public par la censure...Seulement au Québec.

  2. me
    N'importe quoi
    Si le syndic du Barreau devait intervenir, pas certain que ce soit pour ces critiques...

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    Doucet c. 9202-7838 Québec inc.

    2017 QCCS 3125


    COUR SUPÉRIEURE

    (Chambre civile)





    CANADA


    PROVINCE DE QUÉBEC


    DISTRICT D’ARTHABASKA










    N° :

    415-17-001058-134







    DATE :

    LE 7 JUILLET 2017





    ______________________________________________________________________





    SOUS LA PRÉSIDENCE DE

    L’HONORABLE

    CLÉMENT SAMSON, j.c.s.


    ______________________________________________________________________








    SERGE DOUCET


    Demandeur


    c.


    9202-7838 QUÉBEC INC.


    et


    RESTAURANT LA BELLE QUÉBÉCOISE INC.


    et


    9199-9870 QUÉBEC INC.


    et


    VILLE DE DAVELUYVILLE


    Défenderesses


    et


    9202-7838 QUÉBEC INC.


    Demanderesse en mise en cause forcée


    c.


    STATION DE SERVICE HÉON INC.


    Défenderesse en mise en cause forcée





    ______________________________________________________________________





    JUGEMENT SUR DEMANDE

    POUR REJET DE LA PROCÉDURE INTRODUCTIVE D’INSTANCE


    ______________________________________________________________________






    [1] À la suite d’un interrogatoire tenu le 1er octobre 2014, le demandeur n’a pas transmis tous les engagements auquel il avait souscrit. Depuis ce temps, le dossier est paralysé. N’ayant pas reçu tous ces engagements, les défendeurs réclament le rejet de la procédure introductive d’instance.

    LE CONTEXTE

    [2] Pour apprécier cette demande, il est utile de prendre du recul et de jeter un regard sur les faits à la base du recours même du demandeur avant de présenter les procédures et les échanges qui mènent à cette demande de rejet.

    Les faits du litige

    [3] Le 23 août 2011, le demandeur, Monsieur Serge Doucet (Doucet) se porte acquéreur auprès de la défenderesse 9199-9870 Québec inc. d’un immeuble situé à Daveluyville « sans garantie légale aux risques et périls de l’acheteur » pour une somme de 100 000 $, cette somme devant être payée en 2 versements de 50 000 $, l’un le 23 août 2012 et l’autre, le 23 août 2013.

    [4] Doucet n’aurait pas effectué ces 2 versements.

    [5] Le 22 mars 2013, Doucet, se porte acquéreur de Monsieur Stéphane Houle d’un immeuble voisin « sans aucune garantie quant à tous défauts ou vices cachés, l’acquéreur acceptant l’immeuble, à cet égard, à ses risques et périls », pour la somme de 2 700 $ payée comptant et 57 300 $ payable en 114 versements hebdomadaires égaux de 500 $ et un dernier de 300 $.

    [6] Doucet n’aurait effectué aucun de ces versements hebdomadaires.

    [7] Pour justifier sa position, Doucet prétend que les terrains seraient contaminés et en impute la responsabilité à ceux qui les lui auraient vendus et aux voisins qui les auraient contaminés.

    [8] Depuis ce temps, d’après les plaidoiries des avocats en défense, la bâtisse sise sur ces immeubles serait aujourd’hui à l’abandon et condamnée à être démolie.

    Les procédures dans 2 dossiers différents

    [9] Sous le numéro 415-17-000983-126 (autre que le présent dossier), le 19 décembre 2012, après avoir publié des avis préalables, 9199-9870 Québec inc. dépose une procédure en reprise de possession de l’immeuble vendu en août 2011.

    [10] Le 26 février 2013, Doucet dépose une défense et demande reconventionnelle alléguant que l’immeuble est contaminé à la connaissance de 9199-9870 Québec inc. et que cette dernière lui doit des dommages de 50 000 $. Doucet demande d’annuler la vente.

    [11] Le 11 décembre 2013, dans le présent dossier, leur réclamant solidairement la somme de 2 650 000 $, Doucet poursuit les parties suivantes pour des raisons diverses :

    · La Municipalité de Sainte-Anne-du-Sault (aujourd’hui devenue Daveluyville) (appelée «Municipalité»), à titre de propriétaire de lots voisins à partir desquels la contamination aurait migré vers ceux de Doucet :

    o elle aurait omis de publier un avis de contamination sur ces lots qui sont ensuite devenus la propriété de Doucet, faisant en sorte qu’il ne l’aurait pas su avant l’acquisition;

    o elle savait que cette contamination avait pour origine les deux stations-service qui occupaient autrefois les lots devenus aujourd’hui sa propriété et n’a pas pris les mesures pour éviter la migration des hydrocarbures;

    · Restaurant la Belle Québécoise inc. (Restaurant), à titre de responsable d’une station-service autrefois construite sur des lots voisins;

    · 9202-7838 Québec inc., à titre de responsable de l’autre station-service autrefois construite sur des lots voisins;

    · 9199-9870 Québec inc., à titre de venderesse de l’un des lots à Doucet, a omis de l’informer de la présence d’hydrocarbures dans les sols des lots achetés.

    [12] Les dommages réclamés se détaillent ainsi :

    · Une somme de 500 000 $ est réclamée pour la démolition devenue nécessaire de la résidence et du commerce de Doucet, le solage étant affecté par les hydrocarbures;

    · À cause de cette contamination, Doucet aurait vu son crédit affecté auprès des institutions financières, ce pourquoi il réclame 1 000 000 $;

    · La décontamination des deux lots est évaluée à 150 000 $ et le coût de la contamination des eaux souterraines justifie la réclamation de 500 000 $;

    · Finalement, Doucet réclame 200 000 $ pour des dommages non pécuniaires.

    [13] Le 11 décembre 2013, soit le même jour où il dépose sa procédure contre les 4 défenderesses, Doucet demande au Tribunal de joindre ces deux dossiers.

    [14] Vu les motifs soulevés dans le présent dossier, le 20 décembre 2013, Madame la juge Lise Bergeron ordonne la réunion des dossiers. Le dossier en reprise de paiement est alors freiné par le présent dossier.

    [15] Le 3 juillet 2017, puisqu’il ne s’est rien passé dans le dossier de la reprise en paiement à cause de l’inaction dans le présent dossier, le soussigné disjoint les deux dossiers.







    Les faits à la base de la demande en rejet

    [16] Le 1er octobre 2014, Doucet est interrogé hors Cour et souscrit à 17 engagements. Cet interrogatoire était initialement prévu pour le 30 avril 2014. Les engagements devront être communiqués au plus tard le 1er novembre 2014.

    [17] Le 14 octobre 2014, Doucet invoque que son procureur a noté une date erronée pour le rappel de ce dossier en vue de préparer l’inscription de ce dossier. Il demande une prolongation de délai au 23 février 2015. Cette première demande, soutenue par une déclaration sous serment du procureur du demandeur, est accueillie.

    [18] Le 14 janvier 2015, pour la première fois depuis le 1er octobre précédent, certaines informations sont communiquées par l’avocat du demandeur aux défenderesses, mais ces documents ne répondent que bien partiellement aux engagements souscrits.

    [19] Le 21 janvier 2015, une deuxième requête en prolongation de délai est présentée par l’avocat du demandeur. Sous la signature assermentée de la stagiaire du procureur du demandeur, il est affirmé :

    « 8. Au terme de ces 17 engagements, 857 copies de divers documents ont dû être effectuées;

    9. Le 14 janvier 2015, le demande a complété l’obtention des divers documents au titre des 17 engagements et il en a fait communication aux défendeurs;

    10. Désormais, les défendeurs pourront compléter leur défense et produire leur expertise s’il y a lieu; »

    [20] Le 2 février 2015, le jugement est rendu : le délai est prolongé au 12 juillet 2015.

    [21] Le 22 juin 2015, avec une déclaration sous serment de la stagiaire du procureur du demandeur, une troisième demande de prolongation de délai jusqu’au 15 janvier 2016 est faite. Elle contient les mêmes motifs que celle du 22 janvier 2015, en plus d’un nouveau ayant trait à des documents que les défendeurs attendaient pour produire leur défense.

    [22] L’entente sur le déroulement de l’instance du 3 juillet 2015 est signée par toutes les parties. À l’item «Communication des engagements souscrits suite à l’interrogatoire avant défense du demandeur », il est écrit « COMPLÉTÉ », alors que, comme nous verrons, il n’en est rien.

    [23] Le 17 décembre 2015, invoquant encore les mêmes motifs qu’en juin 2015, le demandeur demande une quatrième prolongation de délai. Le 11 janvier 2016, vu l’absence de contestation, le délai est prolongé jusqu’au 9 juillet 2016.

    Les échanges entre avocats pour l’obtention des engagements

    [24] En fait, bien que les défendeurs attendaient effectivement de recevoir des documents d’organismes publics relatifs à ces terrains, ils demandaient aussi au procureur de Doucet d’obtenir des documents car ce qui avait été transmis suite à l’interrogatoire d’octobre 2014 ne correspondait pas aux engagements souscrits.

    [25] Dans le cadre de cette demande de rejet, les avocats en défense déposent les échanges à travers lesquels, à compter de janvier 2016, ils insistent pour obtenir les engagements du demandeur souscrits lors de son interrogatoire 15 mois plus tôt.

    [26] Le 7 janvier 2016, l’avocat de Municipalité et de Restaurant transmet un document exhaustif de 6 pages afin d’expliquer en quoi le demandeur n’a pas respecté ses engagements.

    [27] À cette même date, pour une première fois, le protocole sur le déroulement de l’instance prévoit l’éventualité où les défenderesses ne recevraient les engagements souscrits, elles pourraient écarter l’entente et déposer un avis de gestion, ce qu’elles feront ultérieurement.

    [28] Le 8 janvier 2016, l’un des engagements souscrits étant d’autoriser les défenderesses à consulter le dossier de Doucet auprès des autorités publiques, les défenderesses demandent à Doucet de compléter des formulaires d’autorisation afin d’obtenir des informations complètes de 6 organismes publics.

    [29] Le 1er février 2016, les défenderesses reviennent à la charge pour demander la collaboration de Doucet.

    [30] Le 9 mars 2016, les avocats des défendeurs demandent de nouveau aux avocats de Doucet de lui faire connaître à quel moment il croit être en mesure de donner suite aux demandes formulées par l’avocat de Municipalité et de Restaurant eu égard aux engagements et aux formulaires.

    [31] Le 11 mars 2016, l’avocat de Doucet fournit quelques informations fragmentaires à l’égard tout au plus de 5 engagements pris lors de l’interrogatoire préalable.

    [32] Le 17 mars 2016, l’avocat de Municipalité et de Restaurant explique de nouveau en quoi les documents transmis par Doucet ne répondent pas aux engagements souscrits. Cette lettre de 4 pages est explicite. À titre d’exemple, il écrit :

    « Je vous invite à relire notamment les pages 134 à 137 de l’interrogatoire de votre client. Ce dernier a affirmé sous serment qu’il vous avait remis différents documents provenant de ce Monsieur Casa, confirmant entre autres que l’immeuble en question devait être démoli et qu’il en coûterait 1 500 000 $ pour le reconstruire. Si ces documents existent, je compte donc que vous allez nous les fournir. S’ils n’existent pas, il faudra conclure que votre client a menti lors de l’interrogatoire. »

    [33] Le 5 avril 2016, l’avocat de Municipalité et de Restaurant fait un rappel à l’avocat de Doucet afin d’obtenir réponse à ses demandes.

    [34] Le 15 avril 2016, l’avocat de Doucet transmet à celui de Municipalité et de Restaurant les demandes d’autorisation signées par son client. Étrangement, il ne répond aucunement aux questions relatives aux demandes correspondant aux engagements formulées dans les lettres précédentes.

    [35] Le 3 août 2016, les défenderesses Municipalité et Restaurant déposent une demande d’injonction interlocutoire afin que le demandeur cesse d’afficher sur ses immeubles un avis public indiquant que son dossier judiciaire, vieux de 4 ans, n’est pas réglé. Ces défenderesses allèguent qu’elles n’ont pas reçu les engagements promis lors de l’interrogatoire d’octobre 2014, ce qui est la cause de ce dont se plaint publiquement le demandeur.

    [36] Le 19 septembre 2016, l’injonction est émise contre le demandeur qui acquiesce aux conclusions recherchées.

    [37] De plus, ce même jour, à la demande des défendeurs, une conférence de gestion a lieu en présence du soussigné afin de faire évoluer le dossier. L’avocat de Doucet est présent. Les parties signent une nouvelle entente sur le déroulement de l’instance dans laquelle il est prévu que les engagements souscrits suite à l’interrogatoire du 1er octobre 2014 seront communiqués au plus tard le 21 octobre 2016.

    [38] Rien n’est fait au cours de ce mois.

    [39] Par une déclaration sous serment signée le 19 janvier 2017 en réplique à la demande de rejet, l’avocat de Doucet, pratiquant seul, explique son impossibilité d’agir. Notamment, il invoque que le 16 septembre 2016, il venait d’être convoqué pour plaider pendant 8 semaines, à raison de 5 jours par semaine, dans le cadre d’une audition pour un procès de nature criminelle devant débuter le 17 octobre 2016. Préalablement, il devait préparer cette audition. Puisque son agenda est alors connu de lui, il est étonnant de constater que, 3 jours plus tard, en gestion devant le soussigné, il n’en traite pas un mot.

    [40] Il prétend qu’il avait référé le dossier du demandeur à une technicienne de son bureau qui a cessé de travailler pour lui le 17 octobre 2016, soit presque simultanément au moment fixé dans l’échéancier pour la transmission des engagements.

    [41] Jusqu’au 25 novembre 2016, la déclaration sous serment fait état de nombreuses obligations professionnelles auxquelles il aurait souscrits dans le cadre du procès criminel.

    [42] En regard des semaines qui suivent, il ne donne aucune explication quant à son inaction dans le présent dossier.

    [43] Le 21 décembre 2016, l’avocat de Doucet informe les autres avocats qu’il verra à remédier à ce défaut dans les meilleurs délais.

    [44] Le 4 janvier 2017, il apprend que son adjointe a quitté pendant la période des Fêtes pour un congé de maladie.

    [45] Le 13 janvier 2017, Municipalité et Restaurant formulent une demande de rejet de la procédure de Doucet, à laquelle ils joignent une demande de dommages-intérêts équivalant aux honoraires et déboursés extra-judiciaires.

    [46] Cette demande n’est présentable que le 23 janvier 2017, délai au cours duquel le procureur du demandeur semble toujours inactif.

    [47] La déclaration sous serment du 19 janvier 2017 de l’avocat de Doucet ne contient aucun engagement ni promesse quelconque de fournir les engagements souscrits. Silence radio.

    ANALYSE ET DISCUSSION

    [48] Le Code de procédure civile édicte des règles qui visent à éviter les abus de procédures :

    « 51. Les tribunaux peuvent à tout moment, sur demande et même d'office, déclarer qu'une demande en justice ou un autre acte de procédure est abusif.

    L'abus peut résulter, sans égard à l'intention, d'une demande en justice ou d'un autre acte de procédure manifestement mal fondé, frivole ou dilatoire, ou d'un comportement vexatoire ou quérulent. Il peut aussi résulter de l'utilisation de la procédure de manière excessive ou déraisonnable ou de manière à nuire à autrui ou encore du détournement des fins de la justice, entre autres si cela a pour effet de limiter la liberté d'expression d'autrui dans le contexte de débats publics.

    52. Si une partie établit sommairement que la demande en justice ou l'acte de procédure peut constituer un abus, il revient à la partie qui l'introduit de démontrer que son geste n'est pas exercé de manière excessive ou déraisonnable et se justifie en droit. (…)

    53. Le tribunal peut, dans un cas d'abus, rejeter la demande en justice ou un autre acte de procédure, supprimer une conclusion ou en exiger la modification, refuser un interrogatoire ou y mettre fin ou encore annuler une citation à comparaître. (…)

    54. Le tribunal peut, en se prononçant sur le caractère abusif d'une demande en justice ou d'un autre acte de procédure, incluant celui présenté sous la présente section, ordonner, le cas échéant, le remboursement de la provision versée pour les frais de l'instance, condamner une partie à payer, outre les frais de justice, des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi par une autre partie, notamment pour compenser les honoraires et les débours que celle-ci a engagés ou, si les circonstances le justifient, attribuer des dommages-intérêts punitifs. (…) »

    [49] En regard d’engagements souscrits et non transmis, la Cour d’appel, dans l’arrêt Cosoltec inc. c. Structure Laferté inc. [1], après avoir rappelé le rôle du tribunal d’instance dans l’appréciation des faits, insiste sur le virage pris par le système judiciaire en vue de réduire les délais et les coûts :



    « [29] La détermination de ce qui constitue un abus au sens de l'article 54.1 et suivants C.p.c. relève avant tout de l'appréciation des faits mis en preuve. En l'espèce, le juge de la Cour supérieure a procédé à un examen minutieux des engagements problématiques. Il a conclu que le refus de fournir certains engagements ne résulte pas "d'oublis isolés ou d'inadvertance excusable", mais plutôt d'une conduite désinvolte caractérisée par des manquements répétés et systématiques qui s'inscrivent dans "une stratégie d'épuisement de la partie adverse".

    [49] En fait, des efforts importants sont déployés par le législateur, le barreau et la magistrature québécoise pour moderniser la résolution des conflits. De plus, la voie judiciaire n'est désormais qu'une option parmi d'autres, comme la médiation et l'arbitrage. On souhaite une nouvelle culture juridique et on exhorte à pratiquer le droit différemment. On affirme vouloir favoriser l'accès à la justice en réduisant les délais et les coûts, en simplifiant les procédures, en encourageant les règlements. On réalise aussi que les tribunaux sont un service public aux ressources limitées, dont il ne faut pas abuser. Mais en même temps, on s'inquiète toujours de la baisse du nombre des dossiers, des délais persistants, des honoraires des avocats toujours à la hausse.

    [50] Dans cet univers changeant, de plus en plus de jugements sont rendus non sur le fond des dossiers, mais sur des incidents d'application des nouvelles dispositions. À l'occasion, on peut s'inquiéter du temps, des ressources judiciaires et de l'argent des justiciables investis en modifications d'échéancier et en recherche d'instructions sur la gestion, en requêtes en prolongation de délais d'inscription, en requêtes pour autorisation d'appeler d'un jugement de refus, en pourvois qui n'aident en rien la résolution du différend, en déclarations de rejet sommaire d'une action ou procédure et en pourvois subséquents, etc. Tout cela gaspille des ressources judiciaires déjà limitées, représente des frais pour les parties et éloigne le jour du véritable débat ou de la résolution du litige. »

    [50] Les échéanciers non respectés, les délais inexplicables, le fait que l’avocat soit occupé dans d’autres procès, autant de causes qui, comme le retient la Cour d’appel dans l’arrêt Genest c. Labelle[2], justifient un Tribunal d’instance de mettre fin à un litige :

    « [9] Le moins que l'on puisse dire de l'affaire est qu'elle chemine cahin-caha : les avocats de l'appelante, dont la requête introductive d'instance, même dans sa version réamendée, n'est pas un modèle de clarté, ne font semble-t-il pas preuve de la plus grande des diligences. On trouve ainsi au plumitif la mention d'échéanciers qui n'ont manifestement pas été respectés ou n'ont pas été finalisés et des délais difficilement explicables. (…)

    [18] Cela dit, en accueillant les requêtes en rejet des intimés et en refusant implicitement de relever l'appelante de son défaut, le juge a-t-il judicieusement exercé le pouvoir discrétionnaire que lui confèrent les articles 151.3 ou 169 C.p.c.? (…)

    [24] L'avocat de l'appelante fait également valoir les difficultés qui l'auraient empêché d'agir au cours de la période pendant laquelle il aurait dû fournir les précisions. Or, la lecture de la transcription des journées d'audience du 19 et du 21 décembre 2007 montre que les difficultés ainsi invoquées n'ont rien de très substantiel : l'avocat a dû se mettre au fait du dossier, fort complexe; il allègue avoir eu des procès pendant la période en cause, il affirme avoir été généralement très occupé et évoque même le changement du système informatique de son cabinet.

    [25] Le juge de première instance écrit là-dessus que :

    [13] Lors de l'enquête de la requête en rejet présentée par Gottlieb & Pearson, le 19 décembre 2007, l’avocat de la demanderesse n'a offert aucune raison valable pour son défaut de produire les précisions, tel que convenu à l'échéancier. Son excuse est qu'il n'a commencé à travailler pour la demanderesse que récemment, et que son agenda personnel était très serré.

    [14] Accepter de prendre un dossier de litige avec une histoire comme celle-ci exige qu'on ait suffisamment de temps libre pour l'accomplir dans les délais prévus, et éviter de violer les règles de procédure et de causer les inconvénients ci-haut décrits aux autres avocats en cause, sans raisons valables.

    [26] On ne saurait qu'être d'accord avec ces propos, surtout dans les circonstances, alors qu'une action intentée en octobre 2005 n'en est encore qu'aux préliminaires deux ans plus tard. (…)

    [28] Si l'on récapitule tout ce qui précède, voici donc ce que l'on constate : l'avocat de l'appelante était nouvellement responsable du dossier, manquait de temps à cause de ses autres engagements et devait se familiariser rapidement avec un dossier complexe. Or, dans le contexte d'une affaire qui n'avançait pas et qu'on devait activer, ces excuses sont minces et ne suffisent pas à justifier le fait de ne s'être pas conformé à un échéancier que l'avocat a lui-même négocié, en toute connaissance de cause avec les avocats des intimés.

    [29] Il faut rappeler en outre que si l'appelante a des droits, les intimés en ont aussi, surtout après deux ans d'une instance qui n'avance pas. L'avocat de l'appelante, là-dessus, fait valoir que les intimés ont tout fait, au cours des deux années en question, pour obtenir le rejet — prématuré selon lui — de l'action : cela n'est pas faux, mais il faut lire la requête introductive d'instance, dans ses versions originale (octobre 2005) et réamendée (juillet 2007), pour constater aussitôt que sa facture explique pourquoi les intimés ont cru nécessaire d'agir ainsi, ce qu'on ne saurait leur reprocher. (…)

    [33] Il reste que le juge a fait le constat qu'après plusieurs extensions du délai d'inscription et des retards incessants dans la marche de l'affaire, la clémence ne convenait pas. Il écrit que :

    [19] Il est maintenant évident que la demanderesse ne se considère pas tenue de respecter les règles du Code de procédure civile, règles qu'elle semble considérer comme un inconvénient, et agit comme si aucun délai ne s'appliquait à elle.

    [20] Il est temps de mettre un terme à cette affaire, pour les défendeurs qui en ont demandé le rejet. Les agissements de la demanderesse démontrent clairement son manque de sérieux à s'impliquer dans un litige de cette envergure.

    [34] Le constat est sévère, mais on ne peut pas dire qu'il soit inexact. Le défaut de l'avocat de l'appelante de fournir les précisions à la production desquelles il s'était engagé et qui étaient essentielles aux intimés a été, pour ainsi dire, la goutte qui a fait déborder le vase et c'est ce que le juge a voulu sanctionner, non sans raison. Il avait, au vu de la preuve et des arguments qui lui ont été présentés, le pouvoir discrétionnaire de le faire, que lui confère l'article 151.3 C.p.c., pouvoir qu'il a exercé dans le sens que l'on sait. Il n'a pas, en cela, commis une erreur de droit ou erré manifestement, et sa conclusion, qui repose sur l'appréciation des faits de l'espèce, appelle donc une déférence certaine. »

    [51] Dans l’arrêt Genest c. Duchesne[3], la Cour d’appel rappelle que les sanctions imposées à une partie doivent être proportionnelles à l’importance des manquements constatés. Devant l’inaction répétée d’une partie, un terme doit être mis à une affaire :

    « [10] Les requérantes n’ont pour seule excuse leur prétendue incompréhension des ordonnances auxquelles elles sont assujetties. En dépit du temps écoulé et de leurs nombreuses comparutions devant le juge chargé de gérer l’instance, il semble qu’aucune ordonnance n’ait été suffisamment précise pour permettre aux requérantes de les exécuter volontairement dans les délais impartis.

    [11] Les circonstances de l'affaire justifiaient le juge de prononcer une sanction proportionnelle à la gravité des manquements constatés lorsqu'on prend en compte tous les incidents survenus en cours d'instance en raison du comportement des requérantes. Ces dernières ne font pas voir que le résultat auquel parvient le juge est disproportionné par rapport à leurs fautes. L’attitude stratégique dont elles ont fait montre jusqu’à ce jour doit cesser au nom d’une saine administration de la justice. Le résultat auquel parvient le juge vise à atteindre ce résultat.

    [12] Quant à l’argument portant sur le droit d’être entendu, il faut rappeler que l’article 54.3 C.p.c. prévoit précisément la possibilité pour le Tribunal de rejeter un acte de procédure. En l’espèce, les requérantes pourront toujours contre-interroger les témoins de la partie adverse, s’opposer à une preuve illégale et plaider après que l’enquête aura été déclarée close.

    [13] En définitive, le dossier qui nous est présenté laisse voir qu'il s'agit ici de l'une de ces rares situations où une sanction d'une telle sévérité s'impose. La décision du juge s'inscrit dans un contexte d'absence de collaboration échelonné sur plusieurs années où le moindre détail devient prétexte à la contestation, voire à l'inaction. Le refus systématique de respecter les ordonnances du Tribunal, exprès ou implicite, ne peut être interprété que comme constituant une tentative de priver les intimés des éléments de preuve auxquels ils ont droit. Le juge était donc justifié de conclure :





    [89] Dans les circonstances, force est de conclure qu'il serait illusoire et inutilement répétitif de prononcer une nouvelle ordonnance enjoignant aux défenderesses de fournir les autorisations ordonnées. »

    [52] Forts de ces enseignements, que nous révèle la preuve?

    [53] D’abord, bien que l’avocat de Doucet n’ait pas témoigné, il n’en demeure pas moins que, lors de l’audition, il plaide les faits suivants que le Tribunal résume ainsi :

    · Il ne savait pas pourquoi il a omis de prévenir le Tribunal en septembre 2016 lors de la conférence de gestion eu égard à ses engagements dans un dossier de nature criminelle;

    · Il n’aurait informé l’avocat de Municipalité et Restaurant qu’en janvier et février 2016 qu’il était absent du travail pour cause de maladie;

    · Il reconnaît que les engagements fournis ne sont pas complets, ce qui veut dire que certains ont été fournis et d’autres pas, sans préciser lesquels;

    · Il ne conteste pas la liste produite par l’avocat de Municipalité et Restaurant;

    · Il annonce au Tribunal que la demande de production d’états financiers n’est pas fondée puisqu’il n’y en avait pas, si ce n’est que les quelques pages fournies aux défendeurs;

    [54] Au terme de deux ans d’attente, exception faite des états financiers pour lesquels un doute plane, le demandeur est toujours en défaut de produire les pièces suivantes :

    « #1 : Fournir la preuve du paiement de la propriété située au […];

    #2 : Fournir les états financiers de la cantine pour les années 2011 et 2013;

    #3 : Fournir le document échangé avec la Banque Nationale relativement à une demande de prêt;

    #5 : Fournir copie des comptes de taxes municipales pour les deux propriétés depuis la date d’achat;

    #8 : Fournir une copie des factures d’Hydro-Québec pour le bâtiment depuis que M. doucet en est propriétaire;

    #10 : Fournir la documentation concernant les démarches faites auprès de la Régie du bâtiment, du Ministère de l’environnement, ainsi que des pompiers;

    #11 et 12 : Fournir les documents concernant Terrapex;

    #14 : Fournir les pièces justificatives relatives à un investissement de 50 000 $;

    #15 : Fournir l’ensemble des documents reçus de M. Casa ou de Construction Casa;»[4]

    [55] Pour déterminer s’il y a abus de procédures, il convient d’analyser la démarche de manière générale.

    [56] Bien qu’il ne soit pas illégal d’engager des procédures pour dommages suite à une vente alors qu’on renonce dans l’acte de vente aux garanties habituelles relativement aux défauts et vices cachés, une partie se met en position de devoir surmonter un fardeau de preuve plus lourd qu’en temps normal.

    [57] Ensuite, quand le demandeur réclame des dommages 16 fois plus élevés que le prix d’achat convenu, bien que cela ne soit pas davantage illégal, le demandeur doit être conscient qu’il portera le fardeau de démontrer la justesse de son recours qui paraît alors exagéré.

    [58] De plus, lorsque le prix d’achat payé n’est finalement que de 2 700 $, que le solde demeure impayé depuis 6 ans et que cette transaction se solde par un recours de 2,6 millions de dollars contre le vendeur et des pollueurs voisins, le Tribunal est en droit de s’attendre à ce que le demandeur agisse avec diligence et démontre rapidement le sérieux de sa demande. N’est-il pas aussi raisonnable de penser que, pour le demandeur, si tout est vrai, les dommages subis sont énormes et devraient normalement justifier un empressement sans borne à se faire indemniser?

    [59] Or, le comportement du demandeur n’est pas de cet ordre. Le dossier de la Cour ne contient aucune procédure visant à accélérer ce dossier déjà vieux de 4 ans. Au contraire, c’est sans cesse le demandeur qui requiert des remises. Même la plaidoirie de son procureur, au jour de l’audition de cette demande pour rejet, ne contient aucun signal de cet ordre; c’est davantage le demandeur qui tente d’expliquer pourquoi il a pris du temps pour tenter de donner suite aux demandes légitimes des défendeurs.

    [60] Qui plus est, ce qui est encore plus déconcertant est le fait que le demandeur ne demande pas d’être relevé de son défaut. Dans la déclaration de son procureur, nulle part on peut lire qu’il demande un délai ultime pour se conformer à ses engagements.

    [61] Or, les demandes des défendeurs ne sont pas exagérées. Les défendeurs désirent obtenir des preuves qui sont en lien avec la quantification du dommage et la crédibilité du demandeur. De plus, vu le montant réclamé, ils sont en droit de prendre connaissance des pièces justificatives de cette réclamation qui pèse contre eux.

    [62] Dans les quatre demandes d’extension de délais, le demandeur exprime qu’il a satisfait à ses engagements. Mais, dans les faits, lors de l’audition de la demande de rejet, on ne retrouve pas de contestation face à l’affirmation que les documents demandés n’ont pas tous été fournis. Force est donc de constater que les déclarations sous serment fournies au soutien des demandes d’extension de délais contenaient en quelque sorte des faussetés.

    [63] En avril 2016, Doucet ne répond pas à la demande pour qu’il fasse connaître le moment où seront transmis ces documents. Ensuite, 5 mois passent pour lesquels le Tribunal n’a aucune idée des motifs du demandeur de ne pas s’exécuter.

    [64] Le 19 septembre 2016, devant le Tribunal, le demandeur, par la voie de son procureur, prend des engagements de fournir les documents requis au plus tard le 21 octobre suivant. Quatre semaines lui semblent appropriées alors qu’il vient de s’écouler de longs mois sans répondre aux demandes maintes fois répétées. C’est dire qu’il devait être prêt à les fournir. Mais ce n’était que pure illusion.

    [65] Les semaines passent sans que le demandeur ne donne d’explications.

    [66] Après-coup, l’avocat du demandeur donne comme excuse qu’il était occupé dans un procès criminel, alors que, lors de la conférence de gestion, il savait qu’il s’engageait pour de nombreuses semaines. Si le procureur est occupé au point qu’il ne peut satisfaire deux clients, cela relève de sa responsabilité, mais les défendeurs n’ont pas à subir son inaction.

    [67] S’il est vrai qu’une caisse de documents a été découverte chez l’avocat du demandeur à la fin novembre, alors pourquoi ce dernier ne réagit-il pas immédiatement en expliquant la situation à ses confrères?

    [68] Puis, si ce nouveau motif justifie un retard, alors pourquoi ne met-il pas dès lors la priorité sur ce dossier devenu urgent pour son client qui demande 2,6 millions de dollars? En regard des dernières semaines de novembre et des premières semaines de décembre 2016, le Tribunal ne reçoit aucune explication quant à l’immobilisme de l’avocat.

    [69] En janvier 2017, si son adjointe était absente pour maladie, le demandeur, par la voie de son procureur, n’avait-il pas du temps pour mettre en ordre la caisse de documents et fournir les engagements requis?

    [70] Finalement, si ce procureur n’a vraiment pas le temps, il lui incombait de ne pas accepter ce mandat.

    [71] Le nombre de rappels formulés au demandeur fait disparaître toute tentative qu’il s’agirait d’oublis malheureux. Ces oublis résultent d’une négligence systématique de ce dossier qui découle d’une inconduite désinvolte. Cette façon de procéder participe à ternir la perception qu’ont certains citoyens qui se détournent du système de justice.

    [72] Les défendeurs ont démontré que la procédure du demandeur est abusive et le défendeur n’a pas réussi à repousser la présomption d’abus qui pèse contre lui.

    [73] Est-il normal qu’un dossier introduit en 2013 n’ait pas franchi, trois ans plus tard, le seuil des engagements découlant de l’interrogatoire préalable du demandeur?

    [74] Qui plus est, entre-temps, est entré en vigueur le Code de procédure civile dont l’effet est immédiat. Il prescrit la coopération entre les parties, ce qui a fait foncièrement défaut dans la présente affaire.





    [75] La sanction au déroulement de l’instance doit être proportionnelle aux manquements. Après quatre remises obtenues sur des demi-vérités, devant une procédure d’une ampleur qui soulève des doutes quant à sa valeur, à la suite de demandes incessantes de fournir les engagements souscrits et légitimes qui sont demeurées lettre morte, et en tenant compte de l’absence totale de volonté pour le dépôt des engagements dans un avenir rapproché, le Tribunal n’a d’autre choix que de rejeter simplement la procédure introductive d’instance.

    [76] De plus, le Tribunal rejette la demande de dommages des défendeurs puisque, de remise en remise formulées par le demandeur, ils n’ont pas contesté la fausseté voulant qu’ils aient reçu les engagements souscrits lors de l’interrogatoire du demandeur. Ce silence complice, bien qu’il n’absolve pas le demandeur, doit aussi être sanctionné par le Tribunal. Il y a rejet de leur demande de dommages équivalant aux honoraires.

    POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

    [77] ACCUEILLE la demande de rejet présentée par les défendeurs Restaurant la Belle Québécoise inc. et Ville de Daveluyville;

    [78] REJETTE le recours du demandeur contre tous les défendeurs;

    [79] LE TOUT, avec frais de justice en faveur de tous les défendeurs.







    CLÉMENT SAMSON, j.c.s.





    Duval Avocats


    Me René Duval


    446A, Bonaventure,

    Trois-Rivières (Québec) G9A2B4


    Avocats du demandeur





    Carter Gourdeau


    Me Éric Beaulieu


    5600, boulevard des Galeries, bureau 205


    Québec (Québec) G2K 2H6


    Avocats de 9202-7838 Québec inc.





    Stein Monast


    Me Henri Renault


    70, rue Dalhousie, bureau 300


    Québec (Québec) G1K 4B2


    Avocats du Restaurant la Belle Québécoise inc. et Ville de Daveluyville





    Cain Lamarre


    Me Jean-François Brouillard


    330, rue Cormier, bureau 201


    Drummondville (Québec) J2C 8B3


    Avocats de 9199-9870 Québec inc.





    Caron Garneau Bellavance


    Me Claude Caron


    268, boulevard des Bois-Francs Nord


    Victoriaville (Québec) G6P 1G5


    Avocats de Station de Service Héon inc.





    Date d’audience :

    23 janvier 2017









    [1] 2010 QCCA 1600.


    [2] 2009 QCCA 2438.


    [3] 2015 QCCA 1953.


    [4] Par. 21 de la demande de rejet.



    AVIS :
    Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.



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    • Anonyme
      Anonyme
      il y a 7 ans
      Wow.
      Je suis étonné que Droit-inc. n'ait pas modéré un tel post... c'est pas jugements.qc.ca ici !

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