La Cour suprême tranche dans la cause Guay
Agence Qmi
2014-07-28 09:01:00
M. Guay a travaillé pour Asphalte Desjardins de 1994 à 2008. Il a été directeur de projets pour l'entreprise, qui exécute ses travaux principalement dans les Basses-Laurentides.
Le 15 février 2008, M. Guay remet sa démission, mais informe son employeur qu’il restera en poste pour trois autres semaines, soit jusqu’au 7 mars, pour fermer ses dossiers.
Au moment de remettre sa lettre, il a déjà été embauché par le concurrent. L’employeur a voulu convaincre son employé de rester au sein de l’entreprise, mais il a refusé. Ses patrons ont mis fin à la relation le 19 février, plaidant que M. Guay avait accès à des informations cruciales dans un domaine très concurrentiel.
La CNT a intenté un recours contre Asphalte Desjardins afin de réclamer des indemnités prévues à la Loi sur les normes du travail pour la cessation d’emploi. La CNT a eu gain de cause en juillet 2010 lorsque la Cour du Québec a condamné l’entreprise à verser 6519 $ à M. Guay.
La Cour d’appel du Québec a cependant cassé la décision, précisant que l’employeur qui renonce au préavis donné par l’employé démissionnaire ne met pas fin au contrat de travail, en vertu de l’article 82 de la Loi sur les normes du travail (LNT).
La Cour suprême du Canada a cependant infirmé la décision de la Cour d'appel, et donné raison à M. Guay.
« Le délai de congé donné par le salarié n'a pas pour effet de libérer immédiatement les parties de leurs obligations respectives découlant du contrat de travail. Si l'employeur refuse de laisser le salarié fournir sa prestation de travail et de le rémunérer pendant le délai de congé, il se trouve à "mettre fin au contrat" au sens de l'article 82 de la LNT », a expliqué la Cour suprême.
La décision du plus haut tribunal canadien constitue une victoire pour les travailleurs et pour le droit, a réagi Me Fernand Morin, professeur émérite en droit du travail des universités Laval et de Montréal.
« La Cour d’appel avait oublié la démission du salarié dans son jugement, pour considérer uniquement la liberté de l’employeur de mettre fin à la relation de travail. C’est exactement contraire à l’économie nouvelle du Code civil de 1994, où on traite les deux parties sur un pied d’égalité », a noté Me Morin.
Dans la très vaste majorité des situations, a précisé Guy-François Lamy, directeur des Affaires juridiques au Conseil du patronat du Québec, les employeurs souhaitent profiter du préavis de l’employé.
Par contre, a-t-il ajouté, la décision de la Cour suprême constitue un irritant pour certains employeurs, notamment lorsqu’il s’agit d’un employé de la haute direction ou qui possède un poste clé, et qui compte de nombreuses années d’ancienneté.
« Ce qui est un peu fatiguant pour un employeur c’est lorsqu’il apprendra que son employé non seulement le quitte pour aller chez un concurrent, mais qu’il le quitte en donnant un mois de préavis alors que l’employeur ne veut pas, par exemple, donner plus qu’une heure parce qu’il s’en va chez le concurrent. Il devra indemniser l’employé », a expliqué M. Lamy.
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