Harcelé par le fisc pour rien

Agence Qmi
2015-03-06 10:35:00

À un moment, Normand Laprise a même pensé devoir vendre sa maison pour pouvoir régler ses présumées dettes avec le fisc et tous ses frais pour se défendre.
Furieux de s’être fait cotiser des montants astronomiques qu’il ne devait pas, le chef, qui a été décoré de l’Ordre du Canada à la fin décembre, estime que sa bataille longue et coûteuse contre le fisc était dénuée de tout fondement. « Émotionnellement, ça m’a fait très mal, raconte-t-il. C’est très difficile de vivre ça.»
« Ils font des calculs, des affirmations et ensuite c’est à nous de démontrer qu’ils ont tort, déplore-t-il. Ils peuvent pousser du monde à la faillite comme ça.»
Coupable en partant
Normand Laprise dit avoir senti qu’on le considérait coupable dans toute cette affaire avant même qu’il puisse donner son point de vue. Bref, coupable jusqu’à preuve du contraire. « On a englouti des dizaines de milliers de dollars en frais de comptables et autres pour finalement se faire dire que notre cotisation était ramenée à zéro », dénonce le chef, très critique des méthodes de Revenu Québec.
Un règlement hors cour est intervenu juste avant que le véritable procès contre Revenu Québec commence, selon lui.
Retarder le procès
Selon le chef, Revenu Québec s’est traîné les pieds pour faire retarder le plus possible un procès parce qu’ils savaient qu’ils n’avaient rien contre lui. «On leur poussait dans le dos pour aller le plus vite possible en procès ».
Normand Laprise estime que le fisc lui a fait perdre son temps et son argent et qu’il a nui à sa réputation puisque le litige a été médiatisé.
La réduction drastique de 190 556,68 dollars à 0 de sa facture d’impôt à la fin février laisse le chef profondément marqué et échaudé par des procédures judiciaires interminables contre Revenu Québec.
La communauté des restaurateurs se sent visée
Normand Laprise, un des chefs les plus connus et réputés au Québec, dit que c’est la première fois en 20 ans de carrière qu’il est cotisé par le fisc et forcé de se défendre devant les tribunaux.
Selon lui, toute la communauté des restaurateurs se sent visée en ce moment par le fisc. « Elle n’est pas facile la restauration. Il y a des moyens de contrôle très poussés maintenant », dit-il. En ce moment, il estime que les restaurateurs auraient pourtant besoin d’appui et pas de vérificateurs zélés.
Normand Laprise dit que de nombreux restaurateurs sont honnêtes et travaillent d’arrache-pied pour survivre dans un contexte économique difficile.
Solidarité
Des chefs lui ont parlé de ses problèmes fiscaux jusqu’en Belgique et en France. Des gens qui ne le connaissaient ont fait des commentaires mal informés sur le web.
Heureusement, la communauté des chefs et ses clients au Québec l’ont toujours soutenu. Entre autres, les chefs Martin Picard (Pied de cochon) et David McMillan (Joe Beef) lui ont passé un coup de fil quand ils ont eu vent de ses problèmes avec le fisc. « C’est un petit monde et il y a un respect et une solidarité dans notre confrérie », dit-il.
Méthode de calcul imprécise
Selon Normand Laprise, tous les calculs de Revenu Québec étaient basés sur une méthode de cotisation indirecte très imprécise qui ignorait complètement la comptabilité réelle de son restaurant.
Jugeant que ses états financiers n’étaient pas fiables, la vérificatrice de Revenu Québeca préféré faire des projections de ce que devaient être les véritables revenus du restaurant.
« Je n’ai pas senti du tout que j’avais le soutien du gouvernement là-dedans », dit celui dont le restaurant Toqué! fait rayonner Montréal dans le monde entier.
600 000 dollars effacés
En tout, c’est plus d’un demi-million de dollars que le fisc vient d’effacer purement et simplement en cotisations à trois restaurateurs, dont Normand Laprise, au bistro de gastronomie française Cocagne sur la rue St-Denis dont il est actionnaire à 33%.
Le règlement hors cour ne précise pas comment de présumées ventes cachées de plus d’un demi-million de dollars en alcool et en nourriture ont pu être calculées puis ensuite annulées et ne contient aucune admission d’erreurs du fisc.
Le fisc disait que Laprise avait « fait une fausse représentation (de ses véritables revenus) par incurie ou par omission volontaire ».