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Le témoignage de Jean Charest aurait été « inutile »

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Radio -Canada

2022-04-18 09:29:00

Dix ans après le début de la commission qui a porté son nom, la juge France Charbonneau revient sur l’une des décisions les plus controversées de son mandat…
La juge France Charbonneau. Source: Radio-Canada / Karine Dufour
La juge France Charbonneau. Source: Radio-Canada / Karine Dufour
Selon celle qui a présidé la Commission d'enquête sur l'octroi et la gestion des contrats publics dans l'industrie de la construction, faire témoigner Jean Charest n'aurait pas été utile, d'autant plus qu'une telle manœuvre aurait pu nuire à d'autres procédures judiciaires qui se déroulaient en parallèle.

« Nous avions amassé toute la preuve nécessaire », a-t-elle dit dimanche lors de son passage à l'émission ''Tout le monde en parle'', faisant référence aux révélations de la Commission sur les liens entre le financement politique et l'attribution de contrats publics.

C'est pourquoi, en ce qui avait trait au témoignage de Jean Charest, le « jeu n'en valait pas la chandelle ».

La magistrate explique qu'un tel témoignage aurait pu nuire aux enquêtes en cours sur les mêmes questions, notamment parce que les révélations publiques de M. Charest n'auraient pu être utilisées par les enquêteurs de l'Unité permanente anticorruption (UPAC).

Celle qui est aujourd'hui juge à la Cour supérieure insiste toutefois pour dire que M. Charest aurait pu témoigner s'il l'avait souhaité, une semaine après que ce dernier eut qualifié de « drôle » la décision de ne pas l'avoir invité à témoigner lors d'une entrevue sur le même plateau.

« Si lui avait insisté pour être entendu, comme l'a fait (Guy Chevrette, ancien ministre péquiste des Transports), on l'aurait entendu, et ça, ça aurait changé toute la donne », a-t-elle affirmé. La Commission, explique-t-elle, « ne voulait pas prendre la chance » de voir des preuves dérivées d'un témoignage obtenu « par contrainte » être éventuellement « rayées et rejetées » au cours d'un éventuel procès en vertu du droit de ne pas s'auto-incriminer.

France Charbonneau a également été questionnée sur la fameuse dissidence d'un de ses commissaires, Renaud Lachance. Ce dernier s'était dissocié du rapport final de la Commission en refusant de reconnaître un lien direct ou indirect entre le versement d'une contribution politique et l'octroi de contrats publics.

L'ancien premier ministre Jean Charest. Source: Radio-Canada / Karine Dufour
L'ancien premier ministre Jean Charest. Source: Radio-Canada / Karine Dufour
L'ancien premier ministre Jean Charest s'est d'ailleurs appuyé sur cette dissidence pour se défendre d'allégations de stratégies illicites de financement au Parti libéral du Québec sous sa gouverne.

L'ex-commissaire a qualifié cette dissidence de « malheureuse ».

« On a vu des présidents et vice-présidents de grosses compagnies venir nous dire qu'après avoir reçu pour plusieurs millions de contrats, quelqu'un du parti venait cogner pour leur dire : "C'est le temps de donner." (...) Pour moi, il y a un lien, direct ou indirect », selon la juge France Charbonneau.

Elle a toutefois minimisé cette différence d'opinion, la qualifiant de « ligne dans un rapport de 1300 pages ».

Ultimement, elle estime que les 45 millions de dollars de fonds public investis dans la Commission ont donné de bons résultats pour les Québécois.

« Simplement sur le plan financier, pendant les travaux de la Commission, il y a eu une baisse de 30 % des coûts de construction, a-t-elle rappelé. Quand on pense que le gouvernement doit certainement donner au bas mot 10 milliards de dollars par année, 30 %, ça représente 3 milliards de dollars. »

Elle a également salué l'adoption de la loi 26 et la mise sur pied d'un programme visant à inciter les entreprises ayant fraudé le gouvernement à rembourser ces sommes.

« Ce programme-là a rapporté quelque chose comme 94,7 millions de dollars et, à Laval, le même programme a permis à la Ville de récolter 50 millions de dollars. »
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