Pierre Arcand

Passer du public au privé, est-ce possible?

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Pierre Arcand

2016-05-02 10:15:00

Un avocat en contentieux du gouvernement depuis 2007 se demande s’il est envisageable de faire le saut en pratique privée. Pierre Arcand l’éclaire sur une éventuelle transition…
Question:

Monsieur Arcand,

Je pratique pour un contentieux du gouvernement depuis mon assermentation en 2007. J’ai toujours été attiré par la pratique privée et je songe à quitter mon emploi afin de joindre un cabinet. Je me demande si je rêve en couleur ou si une telle transition est envisageable.
Merci de votre aide,

Réponse:

Cher lecteur,

Pierre Arcand, recruteur juridique, répond à vos questions
Pierre Arcand, recruteur juridique, répond à vos questions
Il s’agit d’une réorientation de carrière majeure, si vous allez de l’avant il serait important de le faire pour les bonnes raisons. Vous avez toujours été attiré par la pratique privée … mais savez-vous ce qu’est réellement une telle pratique?

Il s’agit d’une réalité très différente de ce que vous avez vécu lors des dernières années. Assumant que vous bénéficiez d’une sécurité d’emploi, il serait dommage de la sacrifier pour par la suite être déçu. L’herbe est toujours plus verte sur le terrain du voisin…

Ceci étant dit, si vous êtes malheureux dans votre pratique actuelle un changement pourrait s’imposer. Il vous reste un bon vingt trente d’ans de pratique devant vous alors aussi bien essayer de les passer dans un environnement qui vous convient.

Une telle transition est-elle envisageable ? Oui, dans la mesure ou votre expérience répond à plusieurs critères dont voici les principaux.

Votre pratique est-elle exportable? Travailler pour un contentieux du gouvernement peut équivaloir à pratiquer dans de nombreux domaines du droit. Certains trouvent assez facilement application en pratique privée, d’autres beaucoup moins. Si vous évoluez pour l’Agence du revenu ou encore comme procureur au pénal, on peut imaginer une transition dans laquelle vous pourriez mettre à contribution vos acquis.

Il en va de même si vous pratiquez dans des matières commerciales mais ce sera beaucoup plus difficile si vous vous spécialisez en rédaction législative ou dans un domaine très pointu n’ayant aucune utilité pour le commun des mortels. La question est donc de savoir si votre expertise peut être utile à des éventuels clients de cabinet.

Votre expertise est-elle rare? Même si vous répondez oui au premier critère cela ne veut pas dire que vous pourrez faire le saut en cabinet et y connaître du succès. Vous partez avec 10 ans de retard sur vos confrères alors il faut que vous puissiez avoir un apport qui compense pour cette lacune.

Si très peu d’avocats en pratique privée peuvent servir leurs clients dans votre domaine, certains cabinets pourraient avoir un manque à ce niveau et par conséquent avoir un intérêt pour vous. Si le marché est déjà saturé dans votre spécialisation, l’option de joindre un cabinet existant s’avèrera difficile à concrétiser.

Pouvez-vous attirer des clients ? Assumant que vous ne disposez pas d’une expertise en demande, faire le saut en pratique privée sera tributaire de votre capacité à être auto-suffisant en terme de clientèle. La pratique en cabinet comporte deux options envisageables, être salarié ou être propriétaire (seul ou associé à d’autres). Pour la première option, si votre expertise n’est pas en demande tel que mentionné au critère précédent, il sera difficile de vous faire embaucher à titre de salarié.

Il vous faudra alors joindre un cabinet, ou en démarrer un, en fonction de votre capacité à générer une clientèle à court ou moyen terme. On fait ici référence à votre réseau de contacts, aux confrères qui pourraient vous référer des mandats ainsi qu’aux décideurs avec qui vous avez été en contact. Ne faites pas l’erreur d’assumer que parce vous arrivez sur le marché, les clients vont se bousculer pour venir vous consulter. Développer une clientèle est beaucoup plus difficile qu’on pourrait le croire.

Avez-vous un intérêt pour les affaires ? Les juristes n’ayant jamais touché à la pratique privée sous-estiment l’aspect « business » de la vie en cabinet. Oui vous demeurez un juriste mais vous devenez avant toute chose un entrepreneur et votre pratique, à plus forte raison si vous n’êtes pas salarié, sera en quelques sortes une mini PME. Comme toute PME, si elle n’est pas rentable elle devra fermer ses portes.

Votre responsabilité à titre de premier gestionnaire de cette entreprise sera de la rentabiliser. Ce qui veut dire notamment de gérer les revenus et dépenses, éventuellement d’embaucher des salariés, de gérer les sous délégations gouvernementales (déductions à la source, TPS / TVQ, etc…). Si votre passion est le droit pur et que n’avez que peu d’intérêt pour le monde des affaires, peut-être serait-il plus pertinent de chercher à faire un changement de carrière mais en restant à l’intérieur de l’appareil gouvernemental.

Comme vous pouvez le constater, un changement comme celui que vous envisagez ne se fait pas en criant ciseaux et doit-être mûrement réfléchi. Ceci étant dit, ce n’est pas impossible et en plus si vous êtes de ceux dont la convention collective offre l’aberrante possibilité de quitter votre emploi sans solde pour 12 ou même 24 mois et d’y revenir par la suite, vous ne courrez pas un grand risque à vous lancer dans l’aventure.

À tout événement, la première étape est de sonder le marché alors je vous encourage à contacter certains cabinets afin de titiller leur intérêt. Ça devrait vous donner une bonne idée de la faisabilité de votre projet.

J’espère que ma réponse pourra vous être utile et je vous souhaite une bonne semaine.

La Question au Recruteur

Chaque semaine, le recruteur juridique Pierre Arcand répond à une question posée par vous, chers lecteurs.

La Question au Recruteur de la semaine est choisie parmi toutes celles reçues sur le site. Toutes les questions sont bonnes pour autant qu’elles concernent votre carrière de juriste.

Sur l'auteur

Pierre Arcand s'est spécialisé en recrutement juridique après avoir pratiqué le droit pendant une douzaine d'années. Ayant été associé au sein de cabinets boutiques ainsi que d'un important cabinet de Montréal, il connaît bien la communauté juridique et les enjeux reliés à la pratique du droit tant en cabinet qu'en entreprise. Arcand et Associés, une entreprise spécialisée dans le recrutement de cadres et de professionnels, a été fondée en 1999. Pierre Arcand et son équipe apporte un soutien professionnel tant aux entreprises qu'aux cabinets qui cherchent à recruter les meilleurs candidats disponibles.
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